Taxation des transformations en droit de l’urbanisme et en fiscalité locale
En matière de droit de l’urbanisme, les autorisations d’urbanisme, en ce compris les autorisations délivrées en vue du changement de destination d’un immeuble ou d’une partie d’immeuble1, peuvent être assujetties au paiement de taxes d’urbanisme.
Si, sauf exception2, les changements de destination ne sont pas passibles de la taxe d’aménagement et de la redevance d’archéologie préventive, tel n’est pas le cas en revanche, en région Ile-de-France, en matière de taxe pour création de bureaux, locaux commerciaux et de stockage (TCBCE).
En effet, et ainsi que cela est clairement précisé désormais à l’article L.520-2 du Code de l’urbanisme, certaines transformations sont passibles de la TCBCE. Tel est le cas de :
- l’affectation à usage de bureaux de locaux précédemment affectés à un autre usage (commerce, stockage ou autre)
- l’affectation à usage de locaux commerciaux de locaux précédemment affectés à un usage autre que de bureaux ou de locaux commerciaux
- l’affectation à usage de locaux de stockage de locaux précédemment affectés à un usage autre que de bureaux, de locaux commerciaux ou de locaux de stockage.
Tel sera également le cas dans de la transformation d’un immeuble bénéficiant d’une exonération de la TCBCE en immeuble ne bénéficiant plus d’aucune exonération (par exemple, transformation d’un immeuble de bureaux appartenant à une collectivité publique affecté à son service public en immeuble de bureaux privé).
Toutefois, l’article L.520-12 du Code de l’urbanisme précise que, pour les locaux commerciaux et de stockage transformés, le montant exigible au titre de la TCBCE sera diminué du montant de la taxe d’ores et déjà versé au titre des usages antérieurs de l’immeuble (sous réserve que le redevable puisse apporter la preuve du paiement de ladite taxe). Cette disposition vise à éviter qu’une même surface ne fasse l’objet, à chaque transformation, d’une taxation au tarif plein.
Ainsi, tout porteur de projet, propriétaire, etc., devra nécessairement s’interroger sur l’éventuel assujettissement de son opération à la TCBCE.
Ce questionnement n’est pas neutre financièrement eu égard au montant de la taxe et aux éventuelles pénalités pouvant s’appliquer (une pénalité de 10% ou de 80%, en cas de retard dans la déclaration pouvant être appliquée).
En matière de fiscalité locale, plusieurs problématiques existent en cas de transformation d’immeubles, qu’elles entraînent ou pas un changement de destination ou d’affectation. Rappelons, qu’en vertu du principe d’annualité applicable aux taxes locales, seule la situation au 1er janvier de l’année d’un bâtiment conditionne son imposition pour toute l’année, tant en matière de taxe foncière que de taxe d’habitation, de contribution foncière des entreprises ou encore de taxe annuelle en Ile-de-France.
Deux exemples illustrant des situations incongrues peuvent être cités.
En cas de restructuration lourde affectant le gros oeuvre mais n’entraînant pas de changement d’affectation de l’immeuble, l’Administration refuse de considérer le terrain du chantier comme relevant du foncier non bâti, malgré la jurisprudence du Conseil d’Etat. Dans cette situation, il est indiscutable que l’immeuble est pourtant devenu impropre à un quelconque usage pendant la durée des travaux et a donc perdu sa qualité d’immeuble bâti. Selon l’importance des travaux, un contentieux doit alors être envisagé, tant en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties qu’en matière de taxe annuelle en Ile-de-France.
En cas de réhabilitations ou restructurations d’un immeuble s’accompagnant d’un changement de destination (bureaux en logements, logements en commerces, etc.) mais n’affectant pas le gros oeuvre (pouvant permettre un passage en foncier non bâti), l’Administration entend maintenir l’imposition initiale. En effet, elle considère alors que le changement d’affectation ne peut intervenir qu’après l’achèvement des travaux de reconstruction et non pas dès le jour du démarrage du chantier, pourtant autorisé par un permis de construire. Cela a pour conséquence de maintenir pendant toute la durée des travaux des impositions locales (taxes foncières et, le cas échéant, en taxe annuelle applicable en Ile-de-France) établies sur l’ancienne affectation.
Notes
1 Voir article « Destination et usage d’un immeuble : les conséquences en fiscalité locale », par Cathy Goarant-Moraglia, en p.11 de cette lettre.
2 Article R. 331-3 du Code de l’urbanisme, en ce qui concerne la transformation des locaux destinés à abriter les récoltes, à héberger les animaux, à ranger et à entretenir le matériel agricole, des locaux de production et de stockage des produits à usage agricole, des locaux de transformation et de conditionnement des produits provenant de l’exploitation et, dans les centres équestres de loisir, des bâtiments affectées aux activités équestres
Auteurs
Cathy Goarant-Moraglia, avocat associé, fiscalité locale
Céline Cloché-Dubois, avocat counsel, droit de l’urbanisme et de l’environnement