Rupture du contrat d’agence d’un commun accord : l’agent a tout de même droit à une indemnité
La résiliation d’un contrat d’agence commerciale d’un commun accord de l’agent et de son mandant exonère-t-elle ce dernier du paiement de l’indemnité visée par l’article L.134-12 du Code de commerce ? Telle était la question soumise à la cour d’appel de Paris.
En l’espèce, seize mois après la signature du contrat, les parties convenaient par courrier de « résilier, ce jour et sans préavis le contrat d’agent commercial non exclusif qui les lie ». Pourtant, neuf mois plus tard, l’agent assignait son ancien mandant en paiement d’un arriéré de commissions, ainsi que de la somme de 25 000 euros au titre de l’indemnité de fin de contrat.
La Cour d’appel déboute l’agent de sa demande de paiement d’arriéré de commissions, mais fait droit à sa demande d’indemnité. Alors que le mandant soutenait que la mention d’un commun accord impliquait nécessairement l’initiative de l’agent, la Cour considère qu’il n’appartenait pas à l’agent de démontrer que la rupture n’avait pas été amiablement et réciproquement décidée, mais au mandant de démontrer le contraire, ce qui n’avait pas été le cas en l’espèce (CA Paris, 23 février 2017, n°14/20582).
Cette solution n’est que la simple application des textes. En effet, l’article L.134-12 du Code de commerce pose le principe selon lequel : « En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ». Ce n’est que par exception que la réparation n’est pas due, si et seulement si l’on se trouve dans l’un des cas prévus par le texte, à savoir lorsque :
« 1o La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l’agent commercial ;
2o La cessation du contrat résulte de l’initiative de l’agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;
3o Selon un accord avec le mandant, l’agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu’il détient en vertu du contrat d’agence » (article L.134-13 du Code de commerce).
En l’espèce, rien de permettait d’établir que l’agent avait sollicité la rupture du contrat. En d’autres termes, faute pour le mandant de pouvoir démontrer que la résiliation s’inscrivait dans l’un des cas d’exception énoncés par l’article L.134-13 du Code de commerce, il fallait s’en tenir aux dispositions de l’article L.134-12. L’agent avait donc droit à l’indemnité. Une décision similaire avait déjà été rendue par la cour d’appel de Lyon (CA Lyon, 27 mai 2011, n°10/05744).
Cette décision rappelle donc l’absolue nécessité, alors même que les parties seraient d’accord sur le principe de la rupture du contrat, de verrouiller cet accord soit par la signature d’une transaction avec des concessions réciproques, soit par la présentation de faits et preuves attestant de l’initiative de l’agent pour obtenir la rupture du contrat.
Auteurs
Brigitte Gauclère, avocat counsel, droit commercial, droit de la distribution et immobilier
Miléna Oliva, avocat en droit commercial et droit de la distribution.