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Principales dispositions de la nouvelle convention fiscale franco-belge

Principales dispositions de la nouvelle convention fiscale franco-belge

Une nouvelle convention fiscale conclue entre la France et la Belgique a été signée le 9 novembre 2021. Elle intègre certains des derniers standards internationaux et réforme substantiellement l’imposition des investissements immobiliers réalisés en France par les investisseurs belges. Ses principales dispositions sont présentées ci-après.

L’entrée en vigueur de la nouvelle convention interviendra à l’issue du processus de ratification législatif (vraisemblablement à compter du 1er janvier 2023).

  1. Personnes visées

L’article 1er de la nouvelle convention prévoit un principe de transparence fiscale pour les revenus perçus par une société de personnes dotée de la personnalité morale ou non ou par toute entité analogue. Son application implique toutefois que l’entité considérée soit effectivement reconnue comme transparente en application de la législation fiscale française ou belge et que le revenu soit traité comme celui d’un résident de l’un des deux Etats.

Ce principe de transparence ne joue pas pour les revenus de source belge perçus par des sociétés de personnes françaises. Ces dernières sont, en effet, considérées comme des résidents de France au sens de l’article 4 de la nouvelle convention.

  1. Résidence fiscale

Au sens de l’article 4 de la nouvelle convention, un résident fiscal (i.e. bénéficiaire de la convention) est une personne assujettie à l’impôt en application de la législation d’un Etat contractant en raison de son domicile, de sa résidence ou de son siège de direction.

Il s’agit d’un profond remaniement dans la mesure où la définition de résident actuellement en vigueur ne prévoit pas de condition d’assujettissement à l’impôt. Se fondant sur la jurisprudence du Conseil d’Etat, l’administration fiscale devrait notamment refuser l’application de la nouvelle convention en présence d’entités totalement exonérées d’impôt sur les sociétés (SPPICAV, SICAV-FPS…).

Des clauses spécifiques de la nouvelle convention prévoient néanmoins que les véhicules d’investissement collectif et leurs porteurs de parts pourront, dans certains cas, bénéficier des taux favorables de retenue à la retenue en matière de dividendes et d’intérêts (cf. « dividendes » ci-après).

  1. Etablissement stable

Les dispositions de l’article 5 de la nouvelle convention ont été alignées sur celles de la convention actuellement en vigueur dans sa version consolidée par l’instrument multilatéral.

La durée de 6 mois au-delà de laquelle un chantier est considéré comme un établissement stable a été portée à 9 mois dans la nouvelle convention. La règle anti-fractionnement issue des travaux BEPS n’a pas été intégrée. Cette dernière vise à tenir compte, pour les besoins du calcul de la durée du chantier, des activités exercées par une entreprise étroitement liée à celle qui est titulaire du chantier. Le fractionnement des contrats attribués à différentes sociétés d’un même groupe pourrait donc permettre d’échapper à la qualification d’établissement stable.

  1. Dividendes

Une définition élargie

La définition de la notion de « dividendes » prévue par à l’article 10 de la nouvelle convention a été considérablement élargie. Sont désormais visés tous les revenus soumis au régime des distributions par la législation fiscale française.

En conséquence, les revenus réputés distribués et notamment les intérêts excédentaires en application de l’article 39, 1-3° du CGI, seront traités comme des dividendes par la nouvelle convention et donc potentiellement soumis à retenue à la source.

Taux réduit « standard » de retenue à la source

Le taux de la retenue à la source sur les dividendes versés par une société résidente d’un Etat est désormais limité à 12,8 % (contre 15 % dans la précédente convention) à condition que le bénéficiaire effectif du dividende soit un résident de l’autre Etat.

Cas des véhicules d’investissement immobiliers

Les dividendes payés à partir de revenus ou gains immobiliers par un véhicule d’investissement établi dans un Etat contractant (i) qui distribue la plus grande partie de ses revenus annuellement et (ii) qui bénéficie d’une exonération d’impôt à raison de ses revenus ou gains immobiliers sont désormais soumis à une retenue à la source de 12,8 % si le bénéficiaire effectif est un résident de l’autre Etat contractant détenant directement ou indirectement moins 10 % du capital de ce véhicule.

Cette clause devrait notamment viser les distributions mises en paiement par les SPPICAV au profit de leurs associés résidents belges. Bien entendu, en cas de dépassement du seuil de 10 %, c’est la retenue à la source de droit interne qui s’applique, soit un prélèvement de 25 % en ce qui concerne les bénéficiaires personnes morales belges (pouvant être ramenée 15 % si le bénéficiaire est un OPC comparable).

Cas des organismes de placement collectifs

Le point 6 du protocole de la nouvelle convention permet l’application de la retenue à la source conventionnelle de 12,8 % aux dividendes versés par une société résidente de France ou de Belgique à un OPC (OPCVM et FIA) établi dans l’autre Etat.

La portée pratique de cette disposition semble très limitée en ce qui concerne les dividendes de source française. Lorsqu’elles bénéficient à des OPC étrangers comparables, ces distributions bénéficient d’une exonération totale de retenue à la source de droit interne[1].

Plus-values immobilières

La convention actuellement en vigueur n’accorde pas expressément à la France le droit d’imposer les plus-values sur titres de sociétés à prépondérance immobilière françaises réalisées par les résidents belges. Dans une décision plus que surprenante, le Conseil d’Etat en a toutefois décidé autrement au motif que de tels titres seraient assimilables à des biens immobiliers pour les besoins de l’application de la convention[2].

L’article 13 de la nouvelle convention est venue définitivement trancher ce point pour le futur. Il est désormais prévu que les plus-values réalisées par un résident d’un Etat contractant à l’occasion de la cession de titres d’entités dont les actifs sont constitués pour plus de 50 % de leur valeur de biens immobiliers détenus, directement ou indirectement, dans l’autre Etat contractant seront imposables dans cet autre Etat. En revanche, la nouvelle convention reste muette sur la durée d’appréciation de la prépondérance immobilière.

  1. Impôt sur la fortune immobilière

L’actuelle convention ne comprend aucune disposition visant l’IFI. Les résidents belges sont passibles de l’IFI sur l’ensemble des biens et droits immobiliers qu’ils détiennent directement ou indirectement en France (y compris sur les droits afférents à un contrat de crédit-bail immobilier portant sur un actif français ou sur la fraction de la valeur de rachat d’un contrat d’assurance-vie représentative d’actifs immobiliers situés en France).

L’IFI entre désormais dans le champ d’application de la nouvelle convention. Il pourrait de prime abord s’agir d’une bonne nouvelle pour les résidents fiscaux belges. L’article 21 de la nouvelle convention limite, en effet, le droit d’imposition de la France aux biens et droits immobiliers français ainsi qu’aux titres de sociétés à prépondérance immobilière en France. La France perdrait donc son droit d’imposer les titres de sociétés qui ne sont pas à prépondérance immobilière en France ainsi que les contrats de crédit-bail immobilier et d’assurance-vie détenus par des résidents belges (ces contrats ne constituent pas des biens immobiliers sous l’angle du droit civil français). Or, nous signalons toutefois que la perte du droit d’imposer de la France ne semble jouer qu’en présence d’une imposition effective de ces éléments de fortune en Belgique.

En revanche, la nouvelle convention ne présente aucun intérêt pour les résidents français redevables de l’IFI. Aucun mécanisme d’exonération de la fortune constituée directement ou indirectement de biens ou droits immobiliers belges n’est prévu.

  1. Dispositifs anti-abus

Règle des 365 jours

Afin d’éviter les opérations autour du coupon, l’exonération de retenue à la source concernant les dividendes versés à raison d’une participation d’au moins 10 % du capital est conditionnée à une détention de la participation sur une période minimale de 365 jours.

Clauses de bénéficiaire effectif

On relèvera que les articles 10 (dividendes), 11 (intérêts) et 12 (redevances) de la nouvelle convention contiennent à présent des clauses de bénéficiaire effectif. Cela étant, l’absence de clause de « bénéficiaire effectif » ne prive pas l’administration de la possibilité de réserver le bénéfice d’une convention fiscale aux seuls bénéficiaires réels des revenus considérés[3].

Clause générale anti-abus

L’article 28 de la nouvelle convention intègre la clause générale anti-abus présente dans la version de la convention actuellement en vigueur telle que consolidée par l’instrument multilatéral.

Application des dispositifs anti-abus de droit interne

Enfin, le point 16 du protocole stipule expressément que les dispositions de la nouvelle convention n’empêchent en rien la France d’appliquer les dispositions des articles 209 B, 123 bis, 115 quinquies et 212 du CGI.

 

[1] Article 119 bis, 2 du CGI.

[2] CE 24 février 2020, n° 436392.

[3] CE 23 novembre 2016 n° 383838, 8e et 3e ch., Sté Eurotrade Juice.

 

Article paru dans Option Finance le 17/02/2022

Auteurs

Thierry Granier, avocat associé en droit fiscal

Yacine Bousraf, avocat en droit fiscal

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