Pratiques restrictives de concurrence : attention avant d’assigner aux clauses attributives de juridiction
L’article D.442-3 du Code de commerce attribue à un nombre limité de tribunaux la compétence exclusive pour connaître des pratiques restrictives de concurrence énumérées à l’article L.442-6 du Code de commerce.
Ces dispositions étant d’ordre public, une clause attributive de compétence contenue dans un contrat ne peut faire obstacle à la compétence des juridictions spécialisées (voir par exemple, CA Paris, 22 février 2017, n°16/17924).
Toutefois, un intéressant arrêt de la cour d’appel de Paris du 26 septembre 2017 nous apprend que la clause attributive de compétence ne doit pas être pour autant totalement écartée (CA Paris, 26 septembre 2017, n°17/06554).
Dans cette affaire, une société toulousaine avait rompu un contrat avec une société nantaise. Cette dernière avait saisi le tribunal de commerce de Rennes, juridiction spécialisée pour connaître de l’article L.442-6 du Code de commerce, afin de contester cette rupture, selon elle, brutale.
Le tribunal de commerce de Rennes s’étant déclaré compétent pour connaître de cette action, la société toulousaine avait formé contredit à l’encontre de ce jugement. Elle affirmait notamment que le contrat conclu entre les parties attribuait compétence au tribunal de commerce de Toulouse situé dans le ressort de la cour d’appel de Toulouse.
Or, l’article D.442-3 du Code de commerce dispose que, pour l’application de l’article L.442-6 du Code de commerce, c’est le tribunal de commerce de Bordeaux qui est compétent pour connaître des litiges en la matière dans le ressort des cours d’appel d’Agen, Bordeaux, Limoges, Pau et Toulouse.
La cour d’appel de Paris déclare bien fondé le contredit en considérant que si les articles L.442-6 et D.442-3 « attribuent de manière impérative à certains tribunaux la connaissance des pratiques restrictives de concurrence, elles n’interdisent pas de faire application d’une clause attributive de juridiction pour l’introduction de l’instance dès lors que la juridiction choisie par les parties n’y déroge pas ».
En d’autres termes, bien qu’une clause attributive de compétence ne puisse pas faire échec à la compétence exclusive des juridictions spécialisées pour connaître de l’article L.442-6 du Code de commerce, elle peut néanmoins servir pour déterminer quelle est la juridiction spécialisée territorialement compétente.
Auteur
Vincent Lorieul, avocat, droit de la concurrence et de la distribution