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Ordonnance relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales

Ordonnance relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales

La fusion des institutions représentatives du personnel au sein d’une instance unique était au cœur de la négociation qui a précédé la loi Rebsamen : cette fusion n’était prévue que pour les entreprises de plus de 300 salariés, sous réserve de la conclusion d’un accord collectif majoritaire.

Désireux de persister dans cette volonté de simplification des règles relatives à la représentation du personnel, le Gouvernement actuel a annoncé très tôt son intention de généraliser une instance unique de représentation reprenant l’ensemble des attributions du comité d’entreprise (CE), des délégués du personnel (DP) et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

L’ordonnance relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales, présentée le 31 août, confirme la fusion des instances représentatives du personnel et définit les règles de fonctionnement de cette nouvelle instance : le Comité social et économique.

Nous vous présentons ainsi les principales dispositions de cette ordonnance, et décryptons leurs règles d’entrée en vigueur.

Présentation du Comité social et économique

1. S’agissant de la mise en place du comité social et économique (CSE), celui-ci sera obligatoire dans les entreprises d’au moins 11 salariés.

Dans les entreprises employant 11 à 50 salariés, les représentants du personnel du CSE exerceront les attributions actuelles des délégués du personnel, afin notamment de présenter à l’employeur des réclamations individuelles, de s’assurer de l’application du Code du travail dans l’entreprise, etc.

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le CSE fusionnera les fonctions actuelles des délégués du personnel, du comité d’entreprise et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Il aura la personnalité morale, comme le comité d’entreprise à l’heure actuelle, et pourra donc agir en justice.

Nouveauté de taille, le CSE pourra être mis en place non seulement aux niveaux traditionnels : l’établissement, l’entreprise, le groupe ou encore l’UES, mais aussi au niveau interentreprises.

La mise en place d’une commission spécifique traitant des questions d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail sera obligatoire dans les entreprises ou les établissements d’au moins 300 salariés et pourra être imposée par l’inspecteur du travail dans les autres entreprises ou établissements. La commission se voit confier par délégation du CSE tout ou partie de ses attributions relatives à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail, à l’exception du recours à un expert et des attributions consultatives du comité.

2. S’agissant de la composition du CSE, le nombre de représentants de cette nouvelle instance et leur temps de délégation seront définis ultérieurement par décret. L’ordonnance se borne à préciser que ce temps de délégation ne pourra être inférieur à 10 heures par mois dans les entreprises de moins de 50 salariés et à 16 heures par mois dans les autres entreprises.

La durée des mandats sera de 4 ans et le nombre de mandats successifs sera limité à 3 sauf pour les entreprises de moins de 50 salariés dans des conditions à déterminer également par décret.

Le texte prévoit la possibilité d’instaurer, par accord d’entreprise, des « représentants de proximité » choisis parmi les membres du CSE ou désignés par celui-ci. L’accord définit, entre autres, les attributions de ces représentants, notamment en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail.

3. S’agissant du fonctionnement du CSE,

celui-ci devra se réunir au moins une fois par mois, dans les entreprises de 11 à 49 salariés et dans celle d’au moins 300 salariés, et une fois tous les deux mois dans les entreprises de 50 à 299 salariés, sachant qu’au moins 4 de ces réunions devront porter en tout ou partie sur des questions de santé, sécurité et conditions de travail, comme c’est déjà le cas pour l’actuelle délégation unique du personnel.

Un accord d’entreprise ou, à défaut, un accord conclu avec les membres du CSE, peut organiser ses modalités de fonctionnement : contenu et modalités des consultations, périodicité de celles-ci et des réunions de l’instance, niveau auquel les consultations seront conduites dans les entreprises à structure complexe, composées de CSE d’établissement et d’un CSE central. Cet accord pourra prévoir que l’instance rend un avis unique. En l’absence d’accord et tout comme l’actuel comité d’entreprise, ce comité sera consulté chaque année sur les orientations stratégiques de l’entreprise, sa situation économique et financière, sa politique sociale, les conditions de travail et l’emploi.

À noter qu’un accord d’entreprise ou, à défaut de délégué syndical, un accord conclu entre l’employeur et le comité adopté à la majorité des membres de ce dernier peut fixer le contenu et les modalités de fonctionnement de la base de données économiques et sociales et qu’un accord d’entreprise, ou, à défaut un accord conclu entre le CSE et l’employeur, pourra déterminer le nombre d’expertises dans le cadre des consultations annuelles obligatoires.

Signalons que l’ordonnance prévoit que ces trois types d’accords peuvent d’ores et déjà être négociés en vue d’une application aux instances en place.

Contrairement à ce que prévoyait le projet de loi d’habilitation, le Gouvernement n’a pas rendu obligatoire la demande de plusieurs devis en cas d’expertises. Cependant, il prévoit que les membres du comité social et économique établissent un cahier des charges pour la mission et que l’expert notifie à l’employeur « le coût prévisionnel, l’étendue et la durée d’expertise », selon un délai qui sera fixé par décret en Conseil d’Etat.

4. S’agissant du financement des expertises, le CSE devra prendre en charge leur coût à hauteur de 20%. Jusqu’à présent limité à la nouvelle expertise sur les orientations stratégiques, ce co-financement sera imposé pour toutes les autres expertises, notamment celles liées à des consultations ponctuelles comme par exemple les expertises en cas d’opération de concentration, de projet d’acquisition, de droit d’alerte économique ou encore de projet important modifiant les conditions de travail. En revanche, les expertises relatives à la situation économique, à la politique sociale, aux licenciements collectifs, ou en cas de risque grave restent financées en totalité par l’employeur.

5. S’agissant des ressources du CSE, l’ordonnance prévoit à l’article L. 2315-57 que l’employeur devra verser une subvention de fonctionnement égale à 0,20% de la masse salariale pour les entreprises comprises entre 50 et 2 000 salariés. Cette subvention sera portée à 0,22% pour les entreprises de plus de 2 000 salariés. En réponse à la jurisprudence de la Cour de cassation sur la référence au compte 641, l’article L. 2312-83 définit la masse salariale comme « l’ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions de l’article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale ou L. 744-10 du code rural et de la pêche maritime » à l’exception des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail. Les sommes effectivement distribuées lors de l’année de référence en application d’un accord d’intéressement ou de participation sont incluses dans la masse salariale brute ».

Le comité pourra, par délibération, décider de transférer tout ou partie du montant de l’excédent annuel du budget de fonctionnement à la subvention destinée aux activités sociales et culturelles, ou inversement du budget ASC vers le budget de fonctionnement.

Présentation du Conseil d’entreprise

Un accord d’entreprise majoritaire ou, pour les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, un accord de branche étendu pourra prévoir de fusionner les institutions représentatives du personnel en y incluant les délégués syndicaux. Dans ce cas, l’instance, appelée conseil d’entreprise, pourra conclure des accords collectifs.

De plus, cet accord majoritaire définira les thèmes pour lesquels, en dehors de l’égalité professionnelle et la formation, les décisions de l’employeur devront faire l’objet d’un avis conforme du conseil.

S’agissant de l’entrée en vigueur des dispositions relatives au comité social et économique et au conseil d’entreprise, celle-ci aura lieu au lendemain de la date de publication des décrets d’application, et au plus tard le 1er janvier 2018.

Des mesures transitoires ont été introduites s’agissant de la mise en place du CSE et du Conseil d’entreprise. Quatre périodes doivent être distinguées.

Lorsqu’un protocole d’accord préélectoral a été conclu avant la publication de l’ordonnance, soit avant le 23 septembre 2017, en vue de la constitution ou du renouvellement des instances, il est procédé à leur élection conformément aux règles antérieures. Dans ce cas, le CSE est mis en place à compter du 1er janvier 2020 ou à une date antérieure fixée, soit par accord collectif, soit par l’employeur après consultation du CE ou, à défaut, des DP ou, le cas échéant, de la DUP ou de l’instance regroupée.

En dehors de cette hypothèse, trois situations sont envisagées :

  • lorsque les mandats arrivent à échéance entre le 23 septembre 2017 et le 31 décembre 2017, ils sont automatiquement prorogés jusqu’à cette date ; au surplus, leur durée peut être prorogée au plus d’un an soit par accord collectif soit par l’employeur après consultation des représentants du personnel. Dans ce cas, le CSE est donc mis en place au plus tard au 31 décembre 2018 ;
  • •lorsque les mandats arrivent à échéance entre le 1er janvier et le 31 décembre 2018, leur durée peut être réduite ou prorogée au plus d’un an soit par accord collectif soit par l’employeur après consultation des représentants du personnel. Dans ce cas, le CSE est donc mis en place au plus tard au 31 décembre 2019 ;
  • lorsque les mandats arrivent à échéance après le 1er janvier 2019, le CSE est mis en place lors du renouvellement des délégués du personnel, des membres du CE, du CHSCT, de la DUP ou de l’instance regroupée mise en place par accord collectif et au plus tard le 31 décembre 2019. Il semble résulter de cette rédaction qu’il revient à l’employeur de définir l’instance dont le renouvellement déclenche le processus de mise en place du CSE.

En outre, l’ordonnance prévoit des dispositions spécifiques à certaines situations :

  • dans les entreprises à structure complexe, la durée des mandats peut être, pour un établissement ou pour l’ensemble de l’entreprise, prorogée ou réduite, de manière à ce que leur échéance coïncide avec la date de la mise en place du CSE. Cette prorogation ou cette réduction intervient soit par accord collectif soit par l’employeur après consultation des représentants du personnel ;
  • lorsqu’une entreprise est transférée alors qu’un CSE n’a pas encore été mis en place en son sein, et qu’elle devient un établissement distinct de la nouvelle entité, elle procède à l’élection d’un CSE, sauf si le renouvellement du CSE central de l’absorbante doit intervenir dans un délai inférieur à douze mois suivant le transfert. Un accord collectif peut prévoir des règles différentes;
  • lorsque plusieurs établissements distincts sont transférés et conservent ce caractère, il est procédé au sein de chaque établissement à la mise en place d’un CSE, sauf si le renouvellement du CSE central de l’absorbante doit intervenir dans un délai inférieur à douze mois suivant le transfert. Un accord collectif peut prévoir des règles différentes.
    En tout état de cause, lorsque l’ancienne configuration des instances représentatives du personnel est maintenue, les dispositions du Code du travail qui les concernent continuent à s’appliquer dans leur rédaction antérieure.

Dispositif de valorisation des parcours syndicaux

Actuellement, l’article L. 2141-5 du Code du travail dispose, pour les élus dont les heures de délégation représentent au moins 30% de leur durée de travail, que l’entretien professionnel de fin de mandat permet de procéder au recensement des compétences acquises au cours du mandat. L’ordonnance prévoit que, pour les entreprises de plus de 2 000 salariés, cette disposition s’appliquera désormais à tous les élus, quel que soit le nombre d’heures de délégation dont ils disposent.

Par ailleurs, en cas de mise à disposition par l’employeur d’un salarié auprès d’une organisation syndicale, la convention ou l’accord prévu à l’article L. 2135-8 devra prévoir des aménagements de nature à permettre à l’employeur de respecter son obligation de formation et d’adaptation définie à l’article L. 6321-1 du Code du travail.

Enfin, l’ordonnance prévoit, selon des conditions à préciser par décret en Conseil d’Etat, qu’une entreprise pourra déduire de sa cotisation au financement du dialogue social, prévue à l’article L. 2135-10 (0.016%), les salaires et cotisations du salarié parti en congé de formation, économique, sociale et syndicale.

 

Auteurs

Olivier Dutheillet de Lamothe, avocat associé, droit social.

Béatrice Taillardat Pietri, adjoint du Responsable de la doctrine sociale

Louis Paoli, avocat, droit social

 

Mise à jour de l’article publié le 7 septembre 2017

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