Mise à disposition d’une salle de sport dans l’entreprise : est-ce un avantage en nature soumis aux cotisation sociales ?
15 octobre 2021
De plus en plus d’entreprises souhaitent mettre à disposition une salle de sport au profit de leurs collaborateurs, afin notamment d’améliorer la qualité de vie au travail, de favoriser la cohésion des équipes ou encore de diminuer l’absentéisme.
Or, un tel projet peut soulever de nombreuses interrogations, qu’il est essentiel d’anticiper.
Parmi les questions souvent débattues figure celle de savoir si la participation au financement de la salle de sport entre dans l’assiette des cotisations et contributions sociales.
Le législateur et l’URSSAF ont récemment apporté des précisions à ce sujet permettant, enfin, de sécuriser la pratique des entreprises.
Principe d’assujettissement de l’avantage en nature aux cotisations de sécurité sociale
Par principe, et conformément à l’article L.136-1-1 du Code de la sécurité sociale, « toutes les sommes ainsi que les avantages et accessoires en nature ou en argent qui y sont associés, dus en contrepartie ou à l’occasion d’un travail » sont soumis aux cotisations de sécurité sociale, à la CSG et à la CRDS.
Précisons que l’avantage en nature consiste dans la fourniture ou la mise à disposition d’un bien ou d’un service, permettant au salarié de faire l’économie de frais qu’il aurait dû normalement supporter.
Ainsi, l’avantage en nature constitue un élément de la rémunération qui, au même titre que le salaire proprement dit, doit être intégré à l’assiette des cotisations et contributions sociales.
Au regard de cette définition, les URSSAF considéraient traditionnellement, lors des contrôles, que la mise à disposition gratuite d’une salle de sport constituait un avantage en nature qui devait être soumis aux cotisations de sécurité sociale.
Premiers assouplissements de l’administration afin de favoriser le sport en entreprise
Une instruction ministérielle du 17 avril 1985 faisait preuve de souplesse en prévoyant que, sauf disposition législative ou règlementaire contraire, les prestations en nature ou en espèces servies par les comités d’entreprise aux salariés ou anciens salariés ne donnaient pas lieu à cotisations lorsqu’elles se rattachaient directement à certaines activités sociales et culturelles, comme le sport.
Ainsi, la plupart des activités sportives financées par le comité social et économique (CSE) -anciennement comité d’entreprise – ou par l’employeur en l’absence de CSE, étaient exonérées de cotisations sociales.
Néanmoins, cette tolérance étant d’application stricte, tout avantage qui était alloué par l’employeur en présence d’un CSE faisait le plus souvent l’objet de redressements.
Dans le cadre d’une circulaire du 12 décembre 2019, et afin de permettre le développement de la pratique du sport en entreprise, la Direction de la Sécurité Sociale avait opéré un assouplissement de la règle précitée.
Ainsi, était exonéré de cotisations et de contributions sociales, l’avantage constitué par la mise à disposition par un employeur, même lorsque l’entreprise était dotée d’un CSE, à l’ensemble des salariés, d’un accès à un équipement dédié à la réalisation d’activités sportives tel qu’une salle de sport appartenant à l’entreprise, ou un espace géré par l’entreprise ou dont la location était prise en charge par l’entreprise aux fins d’une pratique sportive. Cette tolérance valait également pour « l’organisation de cours de sport ou d’activités physiques et sportives dans l’un des espaces mentionnés ci-dessus ».
Enfin l’administration ne plafonnait pas le montant de l’exonération de cotisations de sécurité sociale.
La codification et la sécurisation de la tolérance administrative par le législateur
La loi n°2020-1576 de financement de la Sécurité sociale pour 2021 du 14 décembre 2020 a prévu, au sein de l’article L. 136-1-1 du Code de la sécurité sociale, un régime d’exemption de l’assiette sociale de ces avantages.
Ainsi, sont exonérés les avantages que représentent pour les salariés :
-
- la mise à disposition par l’employeur d’équipements sportifs à usage collectif ;
-
- le financement de prestations sportives à destination de l’ensemble des salariés.
Cette disposition précise que les conditions et les limites d’exonération sont prévues par décret.
Les conditions et limites d’exonération précisées par décret et par l’URSSAF
Le décret n° 2021-680 du 28 mai 2021 relatif aux avantages liés à la pratique du sport en entreprise, publié au Journal Officiel du 30 mai 2021, pose les conditions et limites des exonérations de cotisations de sécurité sociale de ces avantages.
L’avantage lié à la mise à disposition d’une salle de sport est désormais exonéré sans limitation
L’article D. 136-2 du Code de la sécurité sociale précise qu’est exclu de l’assiette de cotisations et contributions sociales « l’avantage que représente la mise à disposition par l’employeur d’équipements à usage collectif dédiés à la réalisation d’activités physiques et sportives tels qu’une salle de sport appartenant à l’entreprise ou un espace géré par elle ou dont elle prend en charge la location aux fins d’une pratique d’activité physique et sportive ».
La rédaction de ce texte est assez souple. Il ressort du bulletin officiel de la sécurité sociale (« BOSS ») que cette disposition vise :
-
- la mise à disposition d’une salle de sport appartenant ou louée par l’entreprise ;
-
- la souscription d’un accès collectif à une infrastructure de sport (club de gym …);
-
- la mise à disposition de vestiaires et de douches ;
-
- la mise à disposition d’un matériel sportif.
Cet avantage est exclu de l’assiette des cotisations et contribution sociales sans limitation de montant, et même en présence d’un CSE.
Â
L’avantage lié à certaines prestations sportives à destination de l’ensemble des salariés bénéficie d’une exonération plafonnée
L’article D. 136-2 du Code de la sécurité sociale vise ici « le financement par l’employeur de prestations d’activités physiques et sportives tels que des cours collectifs d’activités physiques et sportives ou des événements ou compétitions de nature sportive ».
Cet avantage est exclu de l’assiette des cotisations et contributions sociales, dans une limite annuelle égale à 5% de la valeur mensuelle du plafond de la sécurité sociale (« PMSS »), soit 171,40 € en 2021, multipliée par l’effectif de l’entreprise.
A ce sujet, le BOSS précise que le nombre de salariés correspond à l’effectif de l’entreprise au cours de l’année précédente, au sens de l’article L.130-1 du Code de la sécurité sociale.
Par ailleurs, pour être éligible à l’exclusion d’assiette, les activités physiques et sportives doivent être organisées par l’employeur qui doit informer l’ensemble des salariés de l’entreprise des conditions d’organisation de ces prestations (présentation des cours proposés, lieux, horaires, modalités d’inscription…).
Cet avantage est cumulable avec les avantages sociaux et culturels (notamment sportifs) éventuellement proposés par un CSE.
Exemple figurant dans le BOSSÂ :
En année N-1, une entreprise compte 550 salariés. L’employeur propose à l’ensemble de ses salariés la possibilité de participer à des cours collectifs de sport.
Les cours sont encadrés par quatre coachs rémunérés par l’employeur chacun à hauteur de 20 000 € par an.
L’ensemble des conditions requises pour bénéficier de l’exclusion d’assiette sociale est rempli.
L’employeur pourra bénéficier de cette exclusion, dans la limite du plafond fixé à 5 % du PMSS, soit 171,40 € par an et par salarié de l’entreprise en 2021.
Le plafond de l’exclusion d’assiette sociale pour cette entreprise s’élève à  :
550 salariés x 171,40 € = 94 050 €
Le montant annuel de l’avantage sport en entreprise financé par l’employeur s’élève à  :
20 000 € x 4 = 80 000 € d’avantage
Le plafond annuel n’est donc pas atteint. L’ensemble de l’avantage peut être exclu de l’assiette sociale.
Pour pouvoir bénéficier de ces exonérations, les prestations doivent être proposées par l’employeur à tous les salariés de l’entreprise quelle que soit la nature et la durée de leur contrat de travail.
Enfin, le BOSS précise que constitue un avantage en nature, qui doit être entièrement réintégré dans l’assiette des contributions et cotisations sociales, le financement de l’employeur contribuant au financement d’abonnements ou inscriptions individuels à des cours dispensés par des organismes extérieurs à l’entreprise.
A lire également
Contrôle URSSAF : obligation de mise en conformité avec les observations anté... 3 janvier 2014 | CMS FL
Covid-19 et dispositif d’exonération de cotisations sociales : attention au p... 30 juillet 2021 | Pascaline Neymond
Exonération des avantages en nature : Mode de garde en crèche ou en micro-crè... 30 juin 2021 | Pascaline Neymond
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 est publiée : nouveau ... 21 décembre 2020 | CMS FL Social
Travail dissimulé : l’information et la communication par l’URSSAF du procÃ... 11 juillet 2023 | Pascaline Neymond
Intéressement : pas de contrôle du juge de la validité du cumul d’un contra... 23 mai 2018 | CMS FL
Les nouveautés en matière de contrôle URSSAF depuis le 1er janvier 2020 : ana... 29 janvier 2020 | CMS FL Social
Outils NTIC : frais professionnels ou avantages en nature ?... 3 octobre 2014 | CMS FL
Articles récents
- L’action en nullité d’un accord collectif est ouverte au CSE
- Complémentaire santé : vigilance sur la rédaction des dispenses d’adhésion
- Précisions récentes sur la portée de l’obligation de sécurité de l’employeur dans un contexte de harcèlement
- La jurisprudence pragmatique du Conseil d’Etat en matière de PSE unilatéral : Délimitation du périmètre du groupe (Partie I)
- Détachement, expatriation, pluriactivité : quelques nouveautés en matière de mobilité internationale
- Avenant de révision-extinction d’un accord collectif : « Ce que les parties ont fait, elles peuvent le défaire »
- Dialogue social et environnement : la prise en compte des enjeux environnementaux à l’occasion des négociations collectives d’entreprise
- L’accès de l’expert-comptable du CSE aux informations individuelles relatives aux salariés lors de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise
- Conférence : Sécuriser vos pratiques pour limiter les risques juridiques dans l’entreprise (risque pénal, congés payés, RPS)
- Le recours à un client mystère : une méthode de contrôle loyale à condition d’être transparente