Maroc | Mesures spécifiques à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de la loi de finances pour 2016
L’application du taux de 10% dans le cadre des contrats «Mourabaha» et «Ijara Mountahia Bitamlik»
La loi de finances pour l’année budgétaire 2016 a ajoutée à la liste des opérations soumises à la TVA au taux réduit de 10% de l’article 99 du CGI, avec droit à déduction, les opérations de financement réalisées dans le cadre des contrats :
- «Mourabaha»
- «Ijara Mountahiya Bitamlik» pour les acquisitions d’habitation personnelle effectuées par des personnes physiques.
L’application du taux de 10% à l’importation de l’orge et du maïs
En vertu de la loi de finances pour l’année budgétaire 2016 et à compter du 1er janvier 2016 l’orge et le maïs sont soumis à la TVA à l’importation au taux unique de 10%, quelle que soit leur destination, en application des dispositions de l’article 121 du CGI.
Exonération en matière d’importation d’aéronefs et d’équipements ferroviaires
En vertu de la loi de finances pour l’année budgétaire 2016 l’article 123 du CGI est complété par les points 46° et 47°, pour inclure dorénavant à la liste des biens exonérés de la TVA à l’importation :
- les aéronefs, d’une capacité supérieure à cent places, réservés au transport aérien ainsi que le matériel et les pièces de rechange, destinés à la réparation de ces aéronefs ;
- les trains et matériel ferroviaires destinés au transport de voyageurs et de marchandises.
Exonération avec droit à déduction des opérations de démantèlement des avions
L’article 92-I-35° du CGI a été complété par la loi de finances pour l’année budgétaire 2016 pour inclure à la liste des opérations exonérées de TVA avec bénéfice du droit à déduction les opérations de démantèlement des avions.
La Direction générale des impôts a précisé dans la note circulaire n°726 relative aux dispositions fiscales de la loi de finances n°70-15 pour l’année budgétaire 2016 que cette exonération n’était soumise à aucune formalité.
Exonération accordée à la Fondation Lalla Salma de prévention et traitement des cancers
A l’instar de l’exonération de la TVA accordée aux associations à but non lucratif, les biens, matériels, marchandises et services acquis par la Fondation Lalla Salma de prévention et traitement des cancers ainsi que les prestations effectuées par cette Fondation sont exonérés de la TVA, avec bénéfice du droit à déduction et ce, à partir du 1er janvier 2016 (disposition codifiée au nouvel article 92-I-46° du CGI).
Application du taux de 20% aux opérations de transport ferroviaire
En vertu de la loi de finances pour l’année budgétaire 2016, le taux normal de 20% est applicable, à compter du 1er janvier 2016, aux opérations de transport ferroviaire de voyageurs et de marchandises qui étaient jusqu’alors soumises au taux réduit de 14%.
Taxation des biens mobiliers d’occasion dans le cadre d’une cession de fonds de commerce
La loi de finances pour l’année budgétaire 2016 a modifié l’article 89-I-8° du CGI pour ajouter les cessions de biens mobiliers d’occasion corrélatives à une vente de fonds de commerce effectués par les assujettis aux opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée.
La Direction générale des impôts a indiqué dans la note circulaire n°726 relative aux dispositions fiscales de la loi de finances n°70-15 pour l’année budgétaire 2016 que «par conséquent, et à l’instar de la taxation des marchandises, la facture de cession doit indiquer séparément le prix de vente HT des biens mobiliers d’occasion, acquis à compter du 1er janvier 2013 ainsi que le montant de la TVA correspondant, en application des dispositions de l’article 125 bis précité, étant précisé que les biens d’investissement acquis antérieurement à cette date demeurent passibles de la régularisation pour défaut de conservation pendant 5 ans prévue par les dispositions de l’article 104-II du CGI».
Suppression de l’accord préalable pour la détermination du prorata de déduction
La loi de finances pour l’année budgétaire 2016 a modifié l’article 104-I du CGI. En effet, la détermination du prorata annuel de déduction lorsque des entreprises englobent des secteurs d’activité réglementés différemment, au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, peut être effectuée distinctement pour chaque secteur, sans que l’accord de l’administration fiscale ne soit requis.
Par conséquent, sont abrogées et modifiées, à partir du 1er janvier 2016, respectivement, les dispositions des articles 97 et 104 du CGI.
Instauration d’une procédure de recouvrement d’office pour non-respect des conditions d’exonération de la TVA du logement social
Il y a lieu de rappeler, qu’en vertu de l’article 92-I-28° du CGI, les opérations de cessions de logements sociaux à usage d’habitation principale, dont la superficie couverte est comprise entre 50 et 80 m2 et dont le prix de vente n’excède pas 250 000 DH hors taxe, sont exonérées de TVA.
Cette exonération est matérialisée par une aide directe accordée aux acquéreurs, égale au montant de la TVA ayant grevé le logement social et versée par le receveur de l’administration fiscale dans les conditions prévues à l’article 93-I du CGI.
Dans le but d’atteindre l’objectif visant à accorder le bénéfice de l’avance de la TVA aux acquéreurs du logement social ayant effectivement affecté ledit logement à titre d’habitation principale, la note de présentation du projet de loi de finances pour l’année budgétaire 2016, prévoyait l’instauration d’une procédure de recouvrement d’office, par état de produit, de l’avance de TVA précitée, en cas de défaut de présentation des documents justifiant l’habitation principale par l’acquéreur au terme de la quatrième année suivant la date d’acquisition.
En conséquence, une procédure de recouvrement d’office a été instaurée par la loi de finances pour l’année budgétaire 2016 qui a introduit plusieurs modifications à l’article 93 du CGI, concernant :
- la séparation des attributions de l’ordonnateur et du comptable public ;
- l’instauration d’une procédure de recouvrement d’office ;
- l’éligibilité à l’exonération de la TVA des logements sociaux financés par des banques participatives.
Remboursement de la TVA grevant les biens d’investissement
On rappelle qu’avant le 1er janvier 2016, le remboursement de la TVA était accordé aux contribuables réalisant des opérations exonérées ou en suspension de taxe, en vertu des dispositions des articles 92 et 94 du CGI.
La loi de finances pour l’année budgétaire 2016 a élargi le champ d’application du remboursement de la TVA pour couvrir les biens d’investissement, à l’exception du matériel, mobiliers de bureau et des véhicules de transport de personnes autres que ceux utilisés pour les besoins de transport public ou de transport collectif du personnel.
Ainsi, à compter du 1er janvier 2016, la taxe grevant les biens d’équipement, matériel et outillages acquis par les contribuables, ouvre droit au remboursement, conformément aux nouvelles dispositions codifiées au nouvel article 103 bis du CGI, à l’exclusion de ceux acquis par les établissements et entreprises publiques.
Ce nouveau dispositif est rédigé comme suit :
« Article 103 bis. – Remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée sur les biens d’investissement
Les assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée bénéficiant du droit à déduction, à l’exclusion des établissements et entreprises publics, dont les déclarations du chiffre d’affaires ont fait apparaitre un crédit de taxe non imputable, peuvent bénéficier du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des biens d’investissement à l’exception du matériel et mobilier du bureau et des véhicules de transport de personnes autres que ceux utilisés pour les besoins de transport public ou de transport collectif du personnel.
Les modalités d’application du remboursement précité sont fixées par voie réglementaire.
La demande de remboursement doit être déposée trimestriellement auprès du service local des impôts, dont relève l’assujetti, au cours du mois qui suit le trimestre au cours duquel la déclaration du chiffre d’affaires fait apparaitre un crédit de taxe non imputable au titre des biens d’investissement.
Le crédit de taxe déductible demandé en remboursement ne doit pas faire l’objet d’imputation. Les contribuables sont tenus de procéder à l’annulation dudit crédit sur la déclaration du chiffre d’affaires du mois ou du trimestre qui suit le trimestre ayant dégagé un crédit de taxe donnant lieu au remboursement.
Ouvre droit au remboursement la taxe sur la valeur ajoutée grevant les factures d’achat dont le paiement est intervenu au cours du trimestre.
Les remboursements de crédit de taxe afférent aux biens d’investissement sont liquidés, dans un délai de trente jours à compter de la date du dépôt de la demande de remboursement, dans la limite du montant de la taxe sur la valeur ajoutée sur lesdits biens d’investissement.
Les remboursements liquidés font l’objet de décisions du ministre chargé des finances ou de la personne déléguée par lui à cet effet et donnent lieu à l’établissement d’un ordre de remboursement ».
Ce nouveau dispositif est applicable aux biens d’investissements acquis à compter du 1er janvier 2016.
La Direction générale des impôts a apporté dans la note circulaire n°726 relative aux dispositions fiscales de la loi de finances n°70-15 pour l’année budgétaire 2016, de nombreuses précisions concernant le dépôt de la demande de remboursement, le délai de remboursement et le contenu du dossier de remboursement.
Cette note circulaire a également apporté des précisions s’agissant du contrôle, de la liquidation et de l’ordonnancement du dossier de remboursement.
Opérations exclues du droit à déduction
Le premier paragraphe de l’article 106-II est modifié comme suit par la loi de finances pour l’année budgétaire 2016 : «n’est pas déductible la taxe ayant grevé les achats, travaux ou prestations de services dont le montant dépasse dix mille dirhams par jour et par fournisseur dans la limite de cent mille dirhams par mois et par fournisseur, et dont le règlement n’est pas justifié par chèque barré non endossable, effet de commerce, moyen magnétique de paiement, virement bancaire, procédé électronique ou par compensation avec une créance à l’égard d’une même personne, à condition que cette compensation soit effectuée sur la base de documents dûment datés et signés par les parties concernées et portant acceptation du principe de la compensation».
Instauration d’un régime spécifique de taxation concernant les activités relevant du secteur de l’agro-industrie
Il est rappelé que le secteur agroalimentaire supportait la TVA sans aucune possibilité de déduction de la TVA grevant certains intrants dans la mesure où les produits agricoles à l’état naturel sont hors champ d’application.
La loi de finances pour l’année 2016 a introduit au niveau du CGI un nouvel article 125 ter instaurant un régime spécifique de taxation des produits agricoles destinés au secteur de l’agroalimentaire.
Ainsi, et par dérogation aux dispositions des articles 101 et 104 du CGI, ouvre droit à déduction la taxe non apparente sur le prix d’achat des légumineuses, fruits et légumes non transformés, d’origine locale, destinés à la production agroalimentaire vendue localement.
Les dispositions introduites par la loi de finances pour l’année budgétaire 2016 sont codifiées au nouvel article 125 ter du CGI sont rédigées comme suit :
«Article 125 ter. – Récupération de la taxe sur la valeur ajoutée non apparente
Par dérogation aux dispositions des articles 101 et 104 ci-dessus, ouvre droit à déduction la taxe non apparente sur le prix d’achat des légumineuses, fruits et légumes non transformés, d’origine locale, destinés à la production agroalimentaire vendue localement.
Le montant de la taxe non apparente est déterminé sur la base d’un pourcentage de récupération calculé par l’assujetti à partir des opérations réalisées au cours de l’exercice précédent comme suit :
– au numérateur, le montant annuel des achats de produits agricoles non transformés, augmenté du stock initial et diminué du stock final ;
– au dénominateur, le montant annuel des ventes des produits agricoles transformés toute taxe comprise.
Le pourcentage obtenu est définitif pour le calcul de la taxe non apparente à récupérer au titre de l’année suivante.
Le pourcentage ainsi déterminé est appliqué au chiffre d’affaires du mois ou du trimestre de l’année suivante pour la détermination de la base de calcul de la taxe non apparente. Cette base est soumise au même taux de la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux produits agricoles transformés».
La Direction générale des impôts a précisé dans la note circulaire n°726 relative aux dispositions fiscales de la loi de finances n°70-15 pour l’année budgétaire 2016 que «… les légumes, fruits et légumineuses importés ne sont pas éligibles à ce régime qu’ils soient exonérés ou taxables, auquel cas la TVA réglée à l’importation demeure déductible. Il en est de même des légumes, fruits et légumineuses d’origine locale utilisés en tant que matières premières pour la réalisation d’un chiffre d’affaires à l’export».
S’agissant de la détermination du pourcentage de récupération, la Direction générale des impôts a précisé dans la note circulaire précitée que «le montant de la taxe non apparente est déterminé sur la base d’un pourcentage de récupération, calculé par l’assujetti à partir des opérations réalisées au cours de l’exercice précédent comme suit :
au numérateur : le montant annuel des achats des produits agricoles non transformés ± variation de stock des produits agricoles non transformés ± variation du coût d’achat des produits agricoles non transformés utilisés dans la production stockée du produit finis/CA local TTC + CA à l’export + taxe fictive sur l’export ;
au dénominateur : le montant annuel total du chiffre d’affaires TTC déclaré au niveau du compte des produits et charges y compris le chiffre d’affaires à l’export ainsi que la TVA fictive y afférente.
Le CA à l’export est retenu au niveau du dénominateur pour le calcul de ce pourcentage de récupération qui détermine en fait la proportion des produits agricoles non transformés, incorporée dans le produit fini qu’il soit exporté ou vendu localement.
Par mesure de simplification, le pourcentage obtenu est définitif pour le calcul de la taxe non apparente à récupérer au titre de l’année suivante. En conséquence aucune régularisation ne doit être effectuée en fin d’exercice».
Auteur
Marc Veuillot,, avocat, responsable CMS Bureau Francis Lefebvre Maroc