Lutte contre la fraude fiscale : les débiteurs de redevances potentiellement visés
Le 1er avril 2015, le site Internet de l’administration fiscale dédié à la lutte contre la fraude fiscale s’est enrichi d’une « carte des pratiques et montages abusifs » décrivant les montages les plus courants. Cette publication a pour but de décourager la mise en place de pratiques jugées abusives voire frauduleuses et d’inviter les personnes y ayant eu recours à régulariser leur situation.
Parmi ces pratiques, l’administration fiscale vise les hypothèses d’abus de convention fiscale par l’interposition de structures masquant le bénéficiaire effectif étranger d’une redevance (redevance d’usage de marque, de droit d’auteur, de brevet, etc.) en vue d’échapper en tout ou partie à la retenue à la source due en France.
Les redevances payées par un débiteur exerçant une activité en France à un bénéficiaire étranger (sauf s’il s’agit d’une société associée de l’Union européenne) sont en effet soumises à une retenue à la source au taux de 33,1/3% (75% dans certains cas), sous réserve des conventions fiscales internationales. En cas d’application d’une convention fiscale internationale, le taux de retenue à la source sur les redevances peut être réduit (entre 5% et 15% le plus souvent), voire nul.
Lorsque le bénéficiaire étranger d’une redevance est établi dans un Etat n’ayant pas conclu de convention fiscale avec la France, il peut sembler tentant, en vue de réduire la retenue à la source française, d’interposer entre ledit bénéficiaire et le débiteur français une société « relais » établie dans un Etat étranger conventionné.
Le débiteur français verse alors ses redevances à la société interposée en revendiquant les avantages conventionnels, à charge pour la société interposée de reverser les sommes perçues au concédant ultime.
L’administration fiscale indique qu’en présence d’un tel schéma, qu’elle juge abusif, elle n’hésitera pas à notifier des rappels de retenue à la source assortis de pénalités élevées.
La vigilance s’impose donc en la matière, surtout si la société interposée n’a que peu ou pas de substance et que son intervention dans la chaîne des versements ne peut être justifiée par des considérations économiques ou juridiques tangibles.
Auteurs
Annabelle Bailleul-Mirabaud, avocat, spécialisée en fiscalité internationale
Christophe Vezinhet, avocat spécialisé en fiscalité directe