LFSS pour 2016 et généralisation de la complémentaire santé
5 janvier 2016
Alors que la généralisation de la complémentaire santé sera effective dans quelques jours, au 1er janvier, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2016, publiée le 22 décembre 2015, apporte de nouvelles modifications sur ce sujet.
Précisions quant au financement patronal de la couverture complémentaire santé
A compter du 1er janvier 2016, les entreprises ont l’obligation de mettre en place une complémentaire santé, dont les garanties minimales sont fixées par l’article L. 911-7 du Code de la sécurité (et son décret d’application). Ce texte, dans sa version issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, précisait que l’employeur devait assurer «au minimum la moitié du financement de cette couverture».
Cette formulation s’est avérée source d’ambiguïtés. L’employeur doit-il prendre en charge la moitié du coût de la couverture minimale prévue par l’article L 911-7 précité ou de la couverture instituée dans l’entreprise qui peut être d’un niveau supérieur ?
L’article 34 de la LFSS pour 2016 met fin à ce débat en remplaçant les mots «cette couverture» par «la couverture collective à adhésion obligatoire des salariés en matière de remboursement complémentaire des frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident».
L’employeur doit ainsi prendre en charge la couverture obligatoire instituée dans l’entreprise même si celle-ci est plus avantageuse que les garanties minimales prévues par la réglementation.
Création de nouvelles dispenses d’adhésion de plein droit
Pour bénéficier des exonérations prévues à l’article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, le caractère obligatoire de l’adhésion des salariés au régime de frais de santé doit être respecté.
Néanmoins, l’article R. 242-1-6 du Code de la sécurité sociale prévoit la possibilité de rendre l’adhésion de certains salariés facultative et ce, sans que les exonérations de cotisations de sécurité sociale ne soient remises en cause, mais sous réserve que cette faculté soit prévue dans l’acte de mise en place du régime (accord collectif, accord référendaire ou décision unilatérale de l’employeur).
La LFSS pour 2016 vient réviser cette règle. En effet, son article 34 modifie l’article L. 911-7 du Code de la sécurité sociale pour prévoir que les salariés en CDD ou en contrat de mission, dont la couverture santé a une durée inférieure à un seuil fixé par décret, peuvent «de plein droit» se prévaloir d’une dispense d’adhésion s’ils justifient bénéficier par ailleurs d’une couverture respectant les nouvelles exigences des contrats responsables. En d’autres termes, pour pouvoir se prévaloir de cette dispense, il n’est pas nécessaire que cette faculté de dispense figure dans l’acte de mise en place du régime.
Un projet de décret fixerait le seuil précité à trois mois.
En outre, ce même article annonce que le décret susvisé dressera également la liste des autres catégories de salariés pouvant se dispenser de droit de l’obligation de couverture «eu égard à la nature et aux caractéristiques de leur contrat ou au fait qu’ils disposent, par ailleurs, d’une couverture complémentaire». Aux vues du projet de décret, il s’agirait :
- des salariés bénéficiaires de la CMU-C ou de l’ACS, la dispense ne pouvant jouer que jusqu’à la date à laquelle les salariés cessent de bénéficier de cette couverture ou aide ;
- des salariés couverts par une assurance individuelle de frais de santé au moment de la mise en place des garanties ou de l’embauche si elle est postérieure, la dispense ne jouant que jusqu’à l’échéance du contrat individuel ;
– des salariés qui bénéficient, y compris comme ayants droit, pour les mêmes risques, d’une couverture collective relevant de l’un des dispositifs de protection complémentaire suivants :
– dispositif de protection sociale complémentaire présentant un collectif et obligatoire ;
– régime local d’Alsace-Moselle ;
– régime complémentaire relevant de la caisse d’assurance maladie des industries électriques et gazières (CAMIEG) ;
– mutuelles des fonctions publiques dans le cadre des décrets n° 2007-1373 du 19 septembre 2007 et n° 2011-1474 du 8 novembre 2011 ;
– contrats d’assurance de groupe dits «Madelin».
Notons que ces nouveaux cas de dispense de plein droit et ceux de l’article R. 242-1-6 du Code de la sécurité sociale se recoupent pour la plupart, mais pas totalement. Ainsi, ne sont pas visés les salariés et apprentis bénéficiaires d’un contrat à durée déterminée ou d’un contrat de mission d’une durée de plus de trois mois où les salariés à temps partiel et apprentis dont l’adhésion au système de garanties les conduirait à s’acquitter d’une cotisation au moins égale à 10 % de leur rémunération brute. Pour ces salariés, la dispense continuera à devoir être prévue dans l’acte de mise en place du régime.
Mise en place d’un dispositif de «versement santé»
L’article 34 de la LFSS pour 2016 insère un article L. 911-7-1 dans le Code de la sécurité sociale.
Celui-ci permet au salarié sous contrats très courts (moins de 3 mois selon le projet de décret) ou à temps très partiel (moins de 15h selon le projet de décret), ayant sollicité une dispense d’adhésion et bénéficiant d’une couverture frais de santé respectant le cahier des charges des contrats «responsables» de bénéficier d’un versement de leur employeur.
Ce versement remplace le financement patronal auquel ont droit les salariés adhérant à une couverture collective et obligatoire et est destiné à financer une couverture de frais de santé souscrite à titre individuelle.
Par ailleurs, ce versement ne peut être cumulé avec le bénéfice de la CMU-C, avec l’ACS, avec une couverture collective obligatoire de frais de santé, y compris en tant qu’ayant droit, ou encore avec une couverture complémentaire donnant lieu à participation financière d’une collectivité publique.
Mais la plus grande nouveauté est qu’un accord de branche, ou à défaut d’un tel accord ou si celui-ci le permet, un accord d’entreprise, pourra également permettre d’exclure de la couverture frais de santé certains salariés dont la durée du contrat ou du travail est inférieure à des seuils fixés par décret, en contrepartie du versement par l’employeur du «versement santé». De manière transitoire, jusqu’au 31 décembre 2016, cette exclusion pourra aussi être opérée par décision unilatérale de l’employeur.
Evolution des modalités de redressement URSSAF
En parallèle à la généralisation de la complémentaire santé, eu égard à la complexification des règles en matière de protection sociale complémentaire, un nouvel article L. 133-4-8, issu de l’article 12 de la LFSS pour 2016, est inséré dans le Code de la sécurité sociale et met en place une possibilité de moduler un redressement URSSAF en fonction de la gravité de l’erreur sanctionnée.
Auteur
Florence Duprat-Cerri, avocat counsel en droit social.
LFSS pour 2016 et généralisation de la complémentaire santé – Article paru dans Les Echos Business le 4 janvier 2016
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