L’avare et l’abus de droit fiscal
Dans un communiqué de presse du 19 janvier 2019, le ministère de l’action et des comptes publics s’est voulu rassurant : la nouvelle théorie de l’abus de droit issue de la loi de finances pour 2019 n’empêchera pas les parents de transmettre la nue-propriété de leurs biens à leurs enfants de leur vivant. Les descendants pourront donc continuer de payer des droits de donation sur une base réduite, et au décès des parents, la pleine propriété se reconstituera chez les enfants en franchise d’impôt.
Jusqu’où peut-il néanmoins nous rassurer ? Dans quelle mesure les donations intra-familiales organisées sous une autre forme que la donation de nue-propriété d’actifs sont-elles immunisées contre le grief d’abus de droit ? Jusqu’à présent, cette question n’avait pas lieu d’être. L’abus de droit ne visait que les opérations fictives ou n’ayant qu’un seul objectif : éviter ou diminuer l’impôt. Mais aujourd’hui, un but principalement fiscal suffit à caractériser l’abus, lorsqu’il se conjugue avec une violation des objectifs du législateur.
Avant-goût théâtral des redressements futurs :
- « Monsieur Harpagon, votre avarice est enfin sanctionnée. En ne donnant que la nue-propriété au lieu de la pleine propriété, vous avez abusivement diminué l’impôt de votre enfant Cléante »
- « Nullement, Monsieur l’inspecteur ! Songez que mon appauvrissement est bien supérieur à l’économie d’impôt réalisée par Cléante ! »
- « Ce qui compte, Monsieur, n’est point le montant de l’appauvrissement. C’est celui de votre objectif non fiscal. Et votre avarice est telle que votre désir de donner vaut bien peu en comparaison de l’avantage fiscal retiré par Cléante »
- « Que l’on saisisse le juge ! »
A retenir
Si les donations de nue-propriété paraissent échapper au grief d’abus de droit, la prudence s’impose dans toute opération de transmission patrimoniale présentant un caractère fiscalement avantageux.
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