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La transformation du CSE lorsqu’une entreprise dépasse le seuil des 50 salariés : modalités et conséquences pratiques

La transformation du CSE lorsqu’une entreprise dépasse le seuil des 50 salariés : modalités et conséquences pratiques

Avant l’entrée en vigueur des ordonnances de 2017, les entreprises étaient tenues de mettre en place deux instances distinctes, un comité d’entreprise et des délégués du personnel, en fonction de leur effectif. Depuis le 1er janvier 2018 et le remplacement des anciennes instances par une instance unique, le CSE devant être mis en place dans les entreprises d’au moins 11 salariés, celui-ci se voit doter de prérogatives différentes selon que l’effectif de l’entreprise atteint ou non 50 salariés. Les modalités de cette transformation d’un « petit » CSE en un « grand » CSE pose des questions nouvelles auxquelles cet article propose des éléments de réponse.

Aux termes de l’article L.2312-2 du Code du travail, « lorsque, postérieurement à la mise en place du comité social et économique, l’effectif de l’entreprise atteint au moins cinquante salariés pendant douze mois consécutifs, le comité exerce l’ensemble des attributions récurrentes d’information et de consultation définies par la section 3 à l’expiration d’un délai de douze mois à compter de la date à laquelle le seuil de 50 salariés a été atteint pendant douze mois consécutifs […] ». Cette rédaction soulève plusieurs questions d’interprétation.

La détermination du point de départ du délai de 12 mois consécutifs pour le franchissement de seuil

La question porte sur le point de savoir si le point de départ du délai de 12 mois consécutifs au terme duquel l’entreprise est réputée avoir franchi le seuil de 50 salariés court à compter de la mise en place du CSE ou à compter de la date à laquelle l’entreprise a franchi pour la première fois le seuil de 50 salariés, et ce, quelle que soit la date de mise en place du CSE.

Sur ce point, le questions-réponses du ministère du Travail est muet. Dans ces conditions, il semble que la prudence recommande de retenir la deuxième interprétation et de considérer que le délai de 12 mois consécutifs court indépendamment de la date de mise en place du CSE; la Direction générale du travail a d’ailleurs validé cette interprétation.

Les conséquences du franchissement du seuil de 50 salariés pendant 12 mois consécutifs sur les attributions du CSE

Aux termes de l’article L.2312-2 précité, à l’expiration d’un délai de 12 mois à compter de la date à laquelle le seuil de 50 salariés a été atteint pendant 12 mois consécutifs, le comité exerce l’ensemble des attributions récurrentes d’information et de consultation.

Le texte n’évoque pas la question des autres attributions des CSE des entreprises d’au moins 50 salariés qu’il s’agisse notamment des attributions générales et des consultations ponctuelles.

Certains auteurs ont dès lors considéré qu’à l’issue du délai de 12 mois suivant la date à laquelle le seuil de 50 salariés a été franchi pendant 12 mois consécutifs, le CSE exerçait les seules attributions d’information et de consultation récurrentes, jusqu’au terme de la mandature[1]. Il nous semble au contraire que, dans le silence du texte, il y a lieu de considérer que l’employeur est immédiatement tenu, c’est-à-dire dès la date de franchissement du seuil, de se conformer à ses obligations d’information et de consultation s’agissant des attributions générales du CSE (notamment, sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la modification de son organisation économique ou juridique, les conditions d’emploi et de travail, l’introduction de nouvelles technologies, les mesures prises en vue de faciliter le maintien au travail des accidentés du travail) et de ses attributions ponctuelles (tels que les projets de restructuration et compression des effectifs, de licenciement collectif pour motif économique, les opérations de concentration et les offres publiques d’acquisition).

En revanche, l’employeur ne sera tenu de respecter ses obligations au titre des trois grandes consultations (orientations stratégiques, situation économique et financière, politique sociale) qu’à l’issue d’un délai de 12 mois à compter de la date à laquelle le seuil de 50 salariés a été atteint pendant 12 mois consécutifs.

Les conséquences du franchissement du seuil de 50 salariés pendant 12 mois consécutifs sur le fonctionnement du CSE

Aucune disposition du Code du travail ne concerne l’application des règles de fonctionnement des CSE pour les entreprises qui franchissent, en cours de mandature, le seuil de 50 salariés.

L’article L.2312-2 du Code du travail qui évoque les règles applicables en cas de franchissement de seuil est d’ailleurs, placé au sein du chapitre II relatif aux attributions du CSE et pourrait donc ne concerner que les attributions du CSE et non les règles de fonctionnement du CSE.

En l’absence d’aménagement légal des dispositions relatives au fonctionnement du CSE en cas de franchissement de seuil, on pourrait être tenté de soutenir que l’ensemble des règles relatives au fonctionnement du CSE s’applique dès que le seuil de 50 salariés a été atteint pour la première fois, sans qu’il y ait lieu d’attendre que ce seuil ait été franchi pendant 12 mois consécutifs. Cette solution conduirait à accorder les moyens d’un « grand » CSE à un CSE qui n’exerce encore aucune des attributions conférées à ce dernier.

 

C’est pourquoi la logique doit conduire à retenir, s’agissant des règles de fonctionnement du CSE, une règle identique à celle qui s’applique pour l’acquisition des prérogatives d’un « grand » CSE.C’est donc à compter de la date à laquelle le seuil de 50 salariés a été atteint pendant 12 mois consécutifs que le CSE est doté des moyens de fonctionnement des « grands » CSE.

 

Dès cet instant, le CSE se voit doter de la personnalité morale, d’un budget de fonctionnement et d’un budget des activités sociales et culturelles (pour autant que l’employeur ait pris l’initiative, avant le franchissement de 50 salariés, de financer des Å“uvres sociales). C’est également à compter de cette date que l’employeur est tenu de convoquer les membres du CSE à une réunion au moins une fois tous les deux mois et de consacrer quatre réunions par an à la santé, la sécurité et les conditions de travail et que le CSE doit désigner un secrétaire et un trésorier.

Les conséquences du franchissement de seuil sur le nombre d’élus

Le franchissement du seuil de 50 salariés n’impose pas l’obligation pour l’employeur d’organiser des élections afin d’élire de nouveaux membres pour tenir compte de l’augmentation de l’effectif. Ce franchissement de seuil n’a par ailleurs aucune conséquence sur les mandats en cours dont le terme n’est pas modifié.

Néanmoins des élections complémentaires pourront être organisées en vue d’élire de nouveaux membres à la condition qu’un accord collectif ait été conclu et qu’il soit signé par tous les syndicats présents dans l’entreprise (Cass. soc., 13 oct. 2010, n° 09-60.206)

On le voit, les entreprises doivent rester vigilantes afin de respecter, dès que l’évolution de leur effectif le justifie, leurs obligations légales s’agissant des prérogatives des institutions représentatives du personnel.

(1) « L’implantation du comité social et économique », Jean-François Cesaro et Arnaud Teissier, La Semaine Juridique Sociale n° 26, 3 Juillet 2018, 1224.

Article publié dans Les Echos Executives le 09/04/2020

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