Index égalité femmes/hommes : comment éviter les sanctions ?
4 février 2022
Afin de lutter contre les inégalités salariales entre les femmes et les hommes, les entreprises d’au moins 50 salariés doivent calculer et publier, au plus tard le 1er mars de chaque année, un index mesurant l’égalité salariale au sein de leur structure.
Cet index de l’égalité professionnelle, calculé selon une méthodologie fixée par voie réglementaire, s’évalue sur 100 points. La note moyenne en 2021 était 85/100 (soit une petite progression d’un point par rapport à 2020). Seules 2% des entreprises obtiennent la note maximale de 100.
Une fois l’index calculé, les entreprises doivent le publier sur leur site Internet et celui du ministère du Travail et prendre, en cas de note inférieure à 75 points, des mesures correctives et se fixer des objectifs de progression.
A défaut, ces entreprises s’exposent à des pénalités financières.
Le point sur les moyens d’éviter les sanctions.
L’obligation de calculer l’Index de l’égalité professionnelle
L’index de l’égalité professionnelle permet aux entreprises concernées d’évaluer le niveau d’égalité entre les hommes et les femmes en s’appuyant sur les indicateurs suivants (1) :
-
- écart de rémunération femmes / hommes
-
- écart de taux d’augmentations individuelles
-
- nombre de salariées augmentées à la suite de leur congé maternité
-
- parité parmi les 10 plus hautes rémunérations
-
- écart de taux de promotions (seulement pour les entreprises de plus de 250 salariés).
Chaque indicateur est calculé et évalué sur un nombre de points. Le total du nombre de points susceptible d’être obtenu est de 100 points.
A noter, pour obtenir le résultat du premier indicateur visant à mesurer l’écart de rémunération, il convient notamment de répartir les salariés par tranches d’âge et par catégorie de « postes équivalents ».
La répartition des salariés par catégories de postes équivalents peut être effectuée selon différentes méthodes : soit par niveau ou coefficient résultant de la classification de branche ou par niveau ou coefficient résultant d’une autre méthode de cotation des postes déterminée par l’entreprise, après avis du CSE, soit selon les quatre catégories socioprofessionnelles. Seuls les groupes comportant au moins trois hommes et trois femmes sont pris en compte.
Le choix de la méthode n’est pas neutre et, d’une année sur l’autre, il est possible de changer de méthode de répartition des salariés (sous réserve de consulter le comité social et économique (CSE) lorsque l’employeur a choisi une catégorisation par niveau ou coefficient hiérarchique en application de la classification de branche ou d’une autre méthode de cotation des postes). Ainsi, il convient d’être attentif à la méthode choisie.
En outre, il existe des situations dans lesquelles les indicateurs sont incalculables (par exemple, lorsqu’aucune augmentation individuelle, aucune promotion ou aucun retour de congé maternité n’est intervenu au cours de la période de référence).
Dans ces hypothèses, les autres indicateurs sont calculés et le nombre de points est ramené sur cent par application de la règle de proportionnalité. Toutefois, si le nombre maximal de points pouvant être obtenus par les indicateurs calculables est inférieur à 75 points, le niveau de résultat ne peut être déterminé mais les autres indicateurs doivent néanmoins être calculés.
L’obligation de prendre des mesures en cas de résultats insuffisants
Si la note globale obtenue est inférieure à 75 points, l’entreprise devra mettre en place, par accord collectif conclu dans le cadre de la négociation sur l’égalité professionnelle ou, à défaut, par décision unilatérale après consultation du CSE, des mesures adéquates et pertinentes de correction des écarts (par exemple, accorder des augmentations individuelles de façon équitable entre les femmes et les hommes, accorder une promotion aux salariés concernés par des écarts de promotion) et, le cas échéant, une programmation de mesures financières de rattrapage salarial (2).
L’accord ou, à défaut, le plan d’action est déposé auprès de la Dreets via la plateforme de téléprocédure TéléAccords, accessible depuis le site www.teleaccords.travail-emploi.gouv.fr (3).
De plus, la loi du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle impose à l’entreprise de fixer, dans l’accord collectif ou le plan d’action destiné à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, des objectifs de progression de chacun de ces indicateurs (tels que veiller à des recrutements mixtes en suscitant les candidatures internes et externes du genre sous-représenté sur les postes où il est sous-représenté, remédier à l’insuffisance de progression de carrière de l’un des deux sexes afin d’assurer une juste représentation des deux sexes à la tête de l’entreprise en suscitant des candidatures du genre sous-représenté sur les postes ouverts).
A noter, l’obligation de fixer des objectifs de progression s’appliquait déjà aux entreprises bénéficiant des aides financières au titre du plan de relance (4) qui obtenaient une note inférieure à 75 points.
Les obligations de publication
Instaurée par la Loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel de 2018, l’obligation de publication n’a cessé depuis d’être renforcée par le législateur.
Elle est désormais triple :
• L’obligation de publication de la note globale et du résultat de chaque indicateur au 1er mars de chaque année
Initialement, l’obligation de publication concernait uniquement la note globale de l’Index égalité femmes/hommes sur le site Internet de l’entreprise, l’information relative au détail des indicateurs était, quant à elle, réservée au comité social et économique (CSE) via la base de données économiques, sociales et environnementales et aux services de l’Inspection du travail.
Depuis le 1er juin 2021, les entreprises doivent publier, de manière visible et lisible, sur le site Internet de l’entreprise lorsqu’il en existe (ou, à défaut, porter à la connaissance des salariés par tout moyen) :
-
- la note globale de l’index ;
-
- mais également le résultat de chacun des cinq indicateurs (quatre indicateurs si l’entreprise compte moins de 250 salariés).
Ces résultats doivent en outre être consultables au moins jusqu’à la publication l’année suivante des résultats obtenus au titre de l’année en cours (5).
La loi du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle ajoute que l’ensemble des indicateurs est rendu public sur le site Internet du ministère du Travail.
Il convient de noter cette obligation de publication des résultats de chaque indicateur sur le site du ministère du Travail concernait déjà les entreprises ayant bénéficié du plan de relance (6).
Si un décret est attendu pour en préciser les modalités, il est probable que ces résultats devront être télédéclarés sur le site https://index-egapro.travail.gouv.fr, sur lequel il est déjà possible de consulter la note globale des entreprises de plus de 250 salariés (7).
• L’obligation de publication des mesures correctives des écarts
Alors qu’elle ne concernait initialement que les entreprises employant plus de 50 salariés ayant bénéficié des aides au titre du plan de relance, la loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle a étendu à toutes les entreprises d’au moins 50 salariés, l’obligation de publication des mesures de correction et de rattrapage que doivent prendre les entreprises dont la note globale est inférieure à 75 points, par une communication externe et interne au sein de l’entreprise.
Les modalités de cette communication externe et interne seront définies par décret. Dans la mesure où ces obligations sont applicables au titre de la période de référence s’achevant au plus tard le 31 décembre 2021 et devant être publiés au plus tard le 1er mars 2022, le décret devrait être publié prochainement.
A noter, la loi du 24 décembre 2021 ne reprend pas la possibilité de publier ces mesures jusqu’au 1er mai 2022, pour les entreprises ayant bénéficié des aides et ayant obtenu, en 2022, au titre de l’année 2021, un niveau de résultat inférieur au seuil de 75 points.
• L’obligation de publication des objectifs de progression de chacun de ces indicateurs
De même, initialement applicable aux seules entreprises employant plus de 50 salariés, ayant bénéficié du plan de relance, l’employeur doit désormais publier les objectifs de progression de chacun de ces indicateurs déterminés dans l’accord collectif ou le plan d’action destiné à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Un décret à paraître prochainement précisera les modalités de publication qui, aux termes de la loi, est applicable au 1er mars 2022.
A noter, le décret pris en application de l’article 244 de loi du 29 décembre 2020 prévoyait que les objectifs de progression et les mesures de correction et de rattrapage devaient être publiés sur le site Internet de l’entreprise lorsqu’il en existe un, sur la même page que la note globale et les résultats de chaque indicateur, dès lors que l’accord ou la décision unilatérale a été déposé sur TéléAccords.
Ils devaient être consultables sur le site Internet de l’entreprise jusqu’à ce que celle-ci obtienne un niveau de résultat au moins égal à 75 points. A défaut de site Internet, ils devaient être portés à la connaissance des salariés par tout moyen.
Les sanctions encourues
Ces entreprises s’exposent à des pénalités financières dans 3 cas :
-
- si elles n’ont pas publié leur Index ;
-
- si elles n’ont pas pris des mesures de correction en cas de note inférieure à 75 points
Le non-respect de l’obligation de publication de l’Index ou l’absence de définition de mesures correctives alors que la note est inférieure à 75 points sont sanctionnés par la même pénalité financière (8).
Celle-ci ne peut être appliquée qu’après mise en demeure de l’entreprise par l’Inspection du travail de procéder à la publication de l’Index ou de prendre des mesures correctives dans un délai minimum d’un mois.
Dans le délai imparti, l’entreprise doit rapporter la preuve de cette publication ou de l’existence de l’accord/de la décision unilatérale fixant les mesures de correction ou justifier des motifs de sa défaillance, lesquels peuvent notamment résulter de la survenance de difficultés économiques, d’une restructuration, d’une fusion ou d’une procédure collective en cours, ainsi que du franchissement de seuil d’effectifs dans les 12 mois précédant l’envoi de la mise en demeure.
À l’issue du délai et à défaut pour l’entreprise d’avoir remédié à cette situation ou justifié des raisons de ce manquement, la Dreets décide s’il y a lieu d’appliquer la pénalité financière.
Si tel est le cas, elle en fixe le taux dans la limite de 1 % de la masse salariale brute du mois entier qui suit le terme de la mise en demeure. Pour ce faire, elle doit tenir compte des éventuels motifs de défaillance de l’entreprise, des mesures prises par l’entreprise en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de la bonne foi de l’employeur.
A défaut de communication de la masse salariale par l’employeur, la pénalité est calculée sur la base de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale par salarié Cette pénalité est due pour chaque mois entier qui suit le terme de la mise en demeure et jusqu’à réception de la preuve du respect des obligations.
A noter, cette pénalité est également applicable lorsque l’entreprise n’est pas couverte par un accord collectif ou, à défaut, par un plan d’action unilatéral relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. En revanche, elle ne s’appliquerait pas en l’absence de fixation d’objectifs de progression.
-
- si le résultat de l’Index est toujours inférieur à 75 points au terme d’une période de 3 ans
Lorsque l’Inspection du travail constate que les résultats de l’entreprise sont inférieurs à 75 points pendant 3 années consécutives, il adresse un rapport au Dreets qui informe l’employeur dans un délai de deux mois de son intention de prononcer une pénalité et lui demande de présenter ses observations dans un délai d’un mois susceptible d’être prolongé pour un mois. L’employeur peut demander à être entendu.
Le Dreets tient compte des mesures prises par l’entreprise en matière d’égalité salariale, de la bonne foi de l’employeur et des motifs de sa défaillance pour accorder à l’entreprise un délai supplémentaire d’un an ou décider de lui appliquer la pénalité.
Dans un délai de deux mois à compter de l’expiration du délai de réponse imparti à l’employeur, le Dreets peut notifier le taux de la pénalité appliqué à l’entreprise.
Le taux de la pénalité est fixé au maximum à 1% de la masse salariale brute de l’année civile précédant l’expiration du délai de trois ans. A défaut de communication de la masse salariale par l’employeur, la pénalité est calculée sur la base de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale, par salarié et par mois compris dans l’année civile de référence.
Lorsque cette seconde pénalité est appliquée, l’employeur ne peut se voir infliger la pénalité financière prévue pour défaut de publication, d’accord ou de plan d’action relatif à l’égalité professionnelle ou de détermination de mesures de rattrapage en cas de résultat inférieur à 75 points (9).
En 2021, 56 entreprises (parmi les 70% d’entreprises publiant leur index), enregistraient une note inférieure à 75 pour la 3e année consécutive et 11 pénalités financières ont été prononcées.
(1) Articles L.1142-1 et D.1142-2 et suivants du Code du travail
(2) Article D.1142-6 du Code du travail
(3) Articles R.2242-3 et D.2231-4 du Code du travail
(4) Article 244 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021
(5) Article D.1142-4 du Code du travail
(6) Article 244 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021
(7) https://index-egapro.travail.gouv.fr/consulter-index/#!/search?q=
(8) Article L.2242-8 et R.2242-3 du Code du travail
(9) Article L.1142-10 et D. 1142-8 et suivants du Code du travail
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