Fiscalité des bailleurs : principales règles applicables aux personnes physiques
Le développement des services numériques a généré pour les propriétaires immobiliers, plus particulièrement de logements, de nouvelles opportunités et, en particulier, un accès aisé à la location de courte durée par l’intermédiaire de diverses plates-formes de services.
Ces opérations n’appellent pas d’observations s’agissant de la fiscalité des sociétés assujetties à l’impôt sur les sociétés, et les commentaires qui suivent se limitent aux règles applicables aux particuliers.
Pour ces derniers, le régime d’imposition des revenus et du patrimoine diffère selon que la location porte sur des logements nus ou meublés. Les produits générés par les activités de location nue relèvent du régime classique des revenus fonciers ; les loyers annuels n’excédant pas 15 000 euros sont en principe éligibles au régime du micro-foncier.
Les activités de location de logements meublés –qui représentent une part prépondérante des locations conclues via des plates-formes dématérialisées– relèvent quant à elles de dispositions spécifiques dépendant notamment du caractère professionnel ou non professionnel de l’activité. Précisons que l’application des règles générales à ces revenus ne devrait pas être remise en cause à la suite des études portant sur l’économie collaborative qui insistent sur le contrôle des revenus plus que sur leur traitement1.
Ces études tendent, en effet, à conclure que les règles d’imposition pertinentes se trouvent déjà dans le panel des règles françaises et que les mesures à prendre concernent davantage l’accès de l’Administration aux informations utiles à son action de contrôle et à la qualification de certaines activités (par exemple la distinction entre le partage de frais –dans le cadre du covoiturage– et la réalisation de revenus, mêmes limités, relevant d’une opération de transport).
Location meublée professionnelle et non professionnelle
- Le caractère professionnel ou non professionnel de la location de logements meublés
L’activité de location de logements meublés ou destinés à être loués meublés est exercée à titre professionnel lorsque trois conditions fixées par l’article 155 du Code général des impôts (CGI) sont réunies :
– un membre du foyer fiscal au moins est inscrit au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueur professionnel ;
– les recettes annuelles retirées de cette activité par les membres du foyer fiscal excèdent 23 000 euros ;
– ces recettes excèdent le montant des autres revenus d’activité du foyer fiscal.
- Imposition des revenus
– Les revenus de l’activité de location meublée sont, dans tous les cas, imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.
De ce fait et sous réserve de l’application du régime des micro-entreprises pour lequel, lorsque les conditions sont remplies, la déduction des charges est opérée par application d’un abattement forfaitaire de 50%, les constructions et biens meubles peuvent faire l’objet d’un amortissement réparti sur leur durée normale d’utilisation.
Nous rappellerons cependant que la déductibilité des amortissements des biens donnés en location par des personnes physiques est limitée à la différence entre le montant du loyer acquis diminué du montant des autres charges afférentes à ces biens (article 39 C II du CGI). La déduction de l’amortissement éventuellement excédentaire est reportée sur le résultat des périodes d’imposition ultérieure (dans la même limite) ou peut intervenir lors de la cessation de la location du bien.
– Lorsque le résultat de l’activité est néanmoins déficitaire, les déficits non professionnels peuvent seulement s’imputer sur des revenus de même nature de l’année ou de l’une des dix années suivantes (article 156 I-1° ter du CGI).
A l’inverse, les personnes exerçant à titre professionnel l’activité de loueur en meublé peuvent imputer les déficits provenant de cette activité sur leur revenu global et sans limitation de montant.
– Enfin, en cas de cession d’actifs immobiliers, les plus-values réalisées par un loueur en meublé non professionnel sont soumises au régime des plus-values des particuliers (application d’abattements pour durée de détention et imposition au taux proportionnel de 19% auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux de 15,5%).
Les plus-values réalisées par les loueurs en meublé professionnels sont quant à elles soumises au régime des plus-values professionnelles (les plus-values à long terme peuvent notamment bénéficier d’une imposition selon un taux proportionnel de 16% auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux de 15,5%). Ces plus-values peuvent par ailleurs bénéficier de l’exonération des plus-values des petites entreprises (article 151 septies du CGI), à condition que l’activité soit exercée depuis plus de cinq ans et que les recettes réalisées au cours de deux années précédant la cession n’excèdent pas 90 000 euros (une exonération dégressive est également applicable si le montant de ces recettes est compris entre 90 000 euros et 126 000 euros).
- Exigibilité de l’ISF
Si le bailleur remplit les conditions pour que son activité de loueur en meublé soit considérée comme exercée à titre professionnel, les locaux d’habitation et les biens meubles affectés à cette activité sont exonérés d’ISF.
Dans le cas contraire, ces mêmes biens seront assujettis à l’ISF. Nous rappellerons toutefois que leur valeur pourra tenir compte de leur situation et, notamment, des contraintes résultant de leur location.
Les régimes d’exonération prévus par la loi
La loi prévoit l’exonération spécifique des produits des locations d’une partie de l’habitation principale dans deux situations particulières (article 35 bis du CGI).
Sont tout d’abord exonérés les revenus tirés de la location d’une partie de l’habitation principale lorsque :
- les pièces louées font partie de la résidence principale du bailleur ;
- les pièces louées constituent la résidence principale du locataire ;
- le prix de location est fixé dans des limites «raisonnables» ; deux plafonds sont fixés chaque année par l’Administration pour le loyer annuel au mètre carré hors charges : l’un pour l’Ile-de-France (184 euros en 2016), l’autre pour les autres régions (135 euros en 2016)2.
A compter du 1er janvier 2016, cette exonération est étendue aux produits de la location en meublé correspondant à la résidence temporaire d’un salarié saisonnier.
Sont également exonérés les revenus tirés de la location d’une partie de l’habitation principale lorsque :
- les pièces louées ou sous-louées font partie de la résidence principale du bailleur ;
- les recettes brutes annuelles, comprenant la location proprement dite mais aussi certaines prestations particulières comme le petit-déjeuner ou le téléphone, n’excèdent pas 760 euros.
Si les recettes annuelles dépassent ce plafond, le bailleur sera imposable sur la totalité des produits nets retirés de la location.
TVA
La location de courte durée et à titre occasionnel d’un logement par un particulier qui en est le propriétaire n’est généralement pas soumise à la TVA.
Comme le précise l’Administration, l’encaissement de loyers (a fortiori à titre occasionnel) ne suffit pas à caractériser l’existence d’une activité économique susceptible d’être passible de la TVA. Quand bien même les modalités de réalisation de cette activité pourraient conférer au propriétaire la qualité d’un assujetti à la TVA (par exemple du fait de la fréquence ou du nombre de logements offerts à la location), la location de logements nus, meublés ou garnis est en principe exonérée de cet impôt sans possibilité pour le bailleur d’opter pour la taxation (article 261 D 2° et 4° du CGI).
Toutefois, lorsqu’elles revêtent un caractère habituel, les locations meublées sont passibles de plein droit de la TVA au taux de 10% si sont offertes, en plus du logement, plusieurs prestations similaires à celles proposées dans l’hôtellerie et définies par la loi (article 261 D 4° b du CGI). En contrepartie, le propriétaire peut récupérer la TVA qui a éventuellement grevé l’acquisition du logement. L’activité peut toutefois s’exercer en franchise de TVA si ces prestations procurent un chiffre d’affaires qui n’excède pas 82 200 euros (ou 90 300 euros si le chiffre d’affaires de l’année N-2 est inférieur à 82 200 euros).
Notes
1 Notamment le rapport que le député Pascal Terrasse vient de remettre au Gouvernement.
2 BOI-BIC-CHAMP-40-20-20160203 § 160.
Auteurs
Elisabeth Ashworth, avocat associé, responsable des questions de TVA et de taxe sur les salaires au sein de l’équipe de doctrine fiscale.
Pierre Carcelero, avocat en matière de fiscalité directe.
Richard Foissac, avocat associé spécialisé en fiscalité directe.