Dividendes intragroupe : anticiper le nouveau frottement fiscal
Un amendement gouvernemental qui vient d’être adopté par les députés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2015 prévoit de supprimer la neutralisation de la quote-part de frais et charges afférente aux dividendes versés entre sociétés d’un même groupe intégré, et de fixer à 1% le taux de la quote-part de frais et charges (QPFC) afférente à ces dividendes.
Ce taux s’appliquerait également aux dividendes que les sociétés membres d’un groupe intégré perçoivent de sociétés « européennes » répondant aux critères posés par la jurisprudence Steria.
Rappelons que cette évolution fait suite à l’arrêt Steria dans lequel la CJUE a jugé contraire à la liberté d’établissement la possibilité de limiter la neutralisation aux dividendes versés entre membres d’un même groupe fiscal, sans en faire bénéficier les dividendes provenant de filiales établies dans un autre Etat-membre de l’Union européenne ou de l’EEE qui, si elles avaient été résidentes de France, auraient pu être membres du groupe.
Ces nouvelles dispositions s’appliqueraient aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016.
Bien que le texte doive encore être soumis au Sénat, la circonstance que l’amendement ait été adopté en première lecture, et la circonstance que, en cas de désaccord entre les deux Chambres, le Gouvernement dispose de la possibilité de faire statuer l’Assemblée nationale en dernier ressort, peuvent laisser penser que ces dispositions ont de fortes chances de se retrouver dans le texte définitif de la Loi de finances rectificative pour 2015.
Dans ce contexte, il pourrait y avoir une opportunité à anticiper les éventuelles distributions prévues entre sociétés intégrées – ou qu’une société « européenne » répondant aux critères posés par la jurisprudence Steria pourrait verser à une société d’un groupe intégré ; en effectuant ces distributions avant le 31 décembre 2015, afin de bénéficier une dernière fois en 2015 de la neutralisation de la QPFC.
L’opportunité d’une telle décision devra être appréciée en tenant compte notamment de son impact sur le calcul de la réserve spéciale de participation de la filiale distributrice (en cas de distribution entre sociétés intégrées) et sur celui de la réserve spéciale de participation de la société mère française s’agissant des dividendes de source européenne.
Les dividendes qui seront versés au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016 feront subir au groupe un frottement en cascade qui pourra conduire certains groupes à s’interroger sur la simplification de leur organigramme.
Auteur
Christophe Leclère, avocat spécialisé en matière de fiscalité directe.