Dispositifs d’alerte professionnelle : nouvelles précisions
7 mai 2015
Un jugement du 15 septembre 2014 rendu par le tribunal de grande instance de Caen rappelle la nécessité d’être vigilant dans la mise en œuvre des systèmes d’alerte professionnelle.
Dans cette espèce, une société française avait mis en place un dispositif d’alerte, limité aux domaines comptable, financier et de lutte contre la corruption, devant permettre à tout salarié de dénoncer n’importe quel autre salarié, au moyen d’une ligne d’assistance téléphonique ou par voie électronique.
Toutefois, en pratique, ce dispositif permettait de rapporter de manière anonyme à l’employeur tout mauvais comportement soupçonné ou d’autres problèmes, ces derniers ne correspondant pas nécessairement aux domaines précités.
Un tel dispositif a logiquement été déclaré illicite par le juge des référés ; ce qu’a confirmé le jugement sus-énoncé.
Ces dispositifs d’alerte professionnelle, non règlementés spécifiquement par le Code du travail, doivent faire l’objet d’une autorisation auprès de la CNIL (une déclaration simplifiée suffisant toutefois dès lors qu’ils respectent les conditions posées par la décision AU-004).
Pour autant, ils sont soumis à un véritable contrôle a posteriori, réalisé par le juge judiciaire.
Ce contrôle, qui s’inscrit dans la philosophie de l’article L.1121-1 du Code du travail, porte sur le domaine de l’alerte qui doit être précis et restreint (indication soigneuse du type de problèmes pouvant être dénoncés et fixation de critères clairs quant aux révélations pouvant être faites). Il vise en particulier à éviter tout risque de délations ou dénonciations calomnieuses.
A cette fin, le juge comme la CNIL encouragent également l’identification de l’auteur de l’alerte afin de le responsabiliser. Les systèmes d’alertes anonymes sont ainsi déconseillés.
Dans l’affaire ayant donné lieu à la décision, c’est l’existence d’un champ d’application trop large quant aux faits susceptibles d’être dénoncés et l’incitation à l’usage anonyme qui ont précisément été sanctionnées.
Auteurs
Caroline Froger-Michon, avocat associé en matière de droit social
A lire également
Surveillance des salariés dans les entreprises : mode de recours à la vidéo-s... 11 mai 2016 | CMS FL
L’application nuancée de la redevance pour copie privée aux cartes mémo... 23 juillet 2015 | CMS FL
Sanction pénale pour traitement non déclaré à la CNIL : le nombre des donné... 18 février 2016 | CMS FL
Créer son application (appli) : 6 points clés à connaître en matière de dro... 26 novembre 2016 | CMS FL
Précisions sur les conditions de mise en œuvre de la responsabilité sociale d... 11 août 2017 | CMS FL
La loi du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alert... 13 mai 2022 | Pascaline Neymond
Alertes professionnelles et protection des données personnelles : Mise à jour ... 22 septembre 2023 | Pascaline Neymond
Sanctions de la CNIL en cas de violation de données personnelles... 28 novembre 2017 | CMS FL
Articles récents
- L’action en nullité d’un accord collectif est ouverte au CSE
- Complémentaire santé : vigilance sur la rédaction des dispenses d’adhésion
- Précisions récentes sur la portée de l’obligation de sécurité de l’employeur dans un contexte de harcèlement
- La jurisprudence pragmatique du Conseil d’Etat en matière de PSE unilatéral : Délimitation du périmètre du groupe (Partie I)
- Détachement, expatriation, pluriactivité : quelques nouveautés en matière de mobilité internationale
- Avenant de révision-extinction d’un accord collectif : « Ce que les parties ont fait, elles peuvent le défaire »
- Dialogue social et environnement : la prise en compte des enjeux environnementaux à l’occasion des négociations collectives d’entreprise
- L’accès de l’expert-comptable du CSE aux informations individuelles relatives aux salariés lors de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise
- Conférence : Sécuriser vos pratiques pour limiter les risques juridiques dans l’entreprise (risque pénal, congés payés, RPS)
- Le recours à un client mystère : une méthode de contrôle loyale à condition d’être transparente