Covid-19 : de nouveaux aménagements des délais en matière sociale !
19 juin 2020
Prises sur le fondement de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, plusieurs ordonnances ont déjà aménagé les délais applicables en matière sociale pour accomplir un acte ou une diligence ou pour agir en justice. Une nouvelle ordonnance publiée au Journal officiel le 18 juin 2020 modifie certains des délais applicables.
Focus sur les principales modifications intéressant le fonctionnement des entreprises.
Prorogation de l’adaptation des délais relatifs à la conclusion des accords collectifs ayant pour objet de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19
L’ordonnance n° 2020-428 du 15 avril 2020 a adapté les règles de négociation des accords dont l’objet est exclusivement de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 ainsi qu’aux conséquences des mesures prises pour limiter cette propagation.
Alors qu’initialement, ces règles de négociation s’appliquaient aux accords conclus jusqu’à l’expiration du délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence, c’est-à-dire jusqu’au 10 août 2020, l’ordonnance du 17 juin 2020 prolonge ce délai jusqu’au 10 octobre 2020 :
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- pour les accords de branche : le délai d’opposition dont disposent les organisations syndicales représentatives non signataires représentant la majorité des suffrages exprimés en faveur de ces mêmes organisations pour s’apposer à la validité d’un accord de branche est ramené de 15 à huit jours. En outre, le délai d’un mois, dont disposent les organisations patronales représentatives, dont les entreprises adhérentes emploient plus de la moitié des salariés des entreprises adhérentes aux organisations syndicales représentatives de la branche, pour s’opposer à l’extension, est réduit à huit jours ;
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- pour les entreprises dotées de délégués syndicaux : si un accord est signé par des organisations syndicales représentant entre 30 % et 50 % des suffrages exprimés aux dernières élections, le délai pendant lequel les organisations syndicales et à l’issue duquel l’employeur peuvent demander l’organisation de la consultation du personnel est réduit d’un mois à huit jours à compter de la conclusion de l’accord. À la suite de cette demande, le délai minimal pour organiser la consultation, pendant lequel les organisations non-signataires peuvent signer l’accord si elles le souhaitent, est réduit de huit à cinq jours ;
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- pour les entreprises d’au moins 50 salariés dépourvues de délégués syndicaux : le délai pendant lequel les élus peuvent faire savoir à l’employeur leur intention de se faire mandater par les organisations syndicales représentatives dans la branche, ou à défaut au niveau national et interprofessionnel, est réduit d’un mois à huit jours.
En revanche, pour les entreprises dont l’effectif est inférieur à onze salariés dépourvues de délégués syndicaux, la disposition réduisant de 15 à cinq jours le délai entre la transmission du projet d’accord et l’organisation du référendum est abrogée à compter du 11 août 2020.
Possibilité d’anticiper la reprise du processus électoral
L’ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 a instauré une suspension des élections en cours et un report des élections professionnelles pendant la période de l’état d’urgence sanitaire. Elle a fixé le délai dans lequel ces élections devaient se tenir après le terme de cette période.
L’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 a modifié les délais initialement fixés afin de garantir que les élections professionnelles suspendues ou reportées se tiennent dans des délais permettant leur prise en compte au titre du 3e cycle de la mesure de l’audience syndicale, c’est-à-dire avant le 31 décembre 2020. Les délais de report et de suspension du processus électoral ont donc été fixés comme suit :
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- pour les entreprises qui n’ont pas engagé le processus électoral avant le 2 avril 2020, alors que les dispositions légales leur imposaient une telle obligation, ainsi que pour celles qui ont rempli les conditions leur faisant obligation d’organiser les élections entre le 12 mars 2020 et le 31 août 2020, le processus électoral doit être engagé par l’employeur à une date qu’il fixe librement entre le 24 mai et le 31 août 2020 inclus, sans que cette date puisse être antérieure à la date à laquelle il lui est fait obligation d’engager cette procédure ;
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- pour les entreprises qui ont engagé leur processus électoral avant le 2 avril 2020, le processus électoral en cours est suspendu à compter du 12 mars 2020 et jusqu’au 31 août 2020. Ainsi en principe, les entreprises ne peuvent poursuivre l’organisation de leurs élections qu’à compter du 1er septembre 2020.
Pour ces dernières, l’ordonnance du 17 juin 2020 prévoit que l’employeur peut décider que cette suspension prend fin à compter d’une date qu’il fixe librement entre le 3 juillet et le 31 août 2020. 15 jours minimum avant la date fixée pour la reprise du processus électoral, il en informe alors par tout moyen :
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- les organisations syndicales qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise ou l’établissement concernés ;
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- les organisations syndicales reconnues représentatives dans l’entreprise ou l’établissement, celles ayant constitué une section syndicale dans l’entreprise ou l’établissement, ainsi que les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel ;
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- le Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte), s’il a été saisi d’une contestation sur la détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts, sur la répartition des salariés dans les collèges électoraux ou sur la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel ;
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- les salariés.
Modification de la fin des aménagements des délais d’instruction des demandes de reconnaissance des accidents du travail, des maladies professionnelles (AT/MP) et des contestations d’ordre médical des décisions des organismes de sécurité sociale
L’ordonnance du 17 juin 2020 modifie les dates limites de prorogation des délais fixés dans ces matières par l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020.
Ainsi, pour les procédures de reconnaissance des AT/MP, les délais impartis aux salariés et employeurs, qui expirent entre le 12 mars et une date fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale qui ne peut être postérieure au 10 octobre 2020 inclus, sont prorogés conformément aux dispositions de l’ordonnance n°2020-460 du 22 avril 2020 :
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- la victime doit déclarer l’accident du travail dans les 48 heures (et non dans les 24 heures), l’employeur doit procéder à sa déclaration dans les cinq jours (et non 48 heures) ;
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- la victime doit déclarer à la Caisse primaire d’assurance maladie la maladie professionnelle dont elle demande réparation dans un délai de 30 jours au lieu de 15, à compter de la cessation du travail ;
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- le délai de dix jours francs pour émettre des réserves à compter de la date à laquelle l’employeur a effectué la déclaration ou de la réception de la déclaration de la victime est porté à 12 jours ;
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- le délai de réponse aux questionnaires est prorogé de dix jours pour les accidents du travail et les maladies professionnelles et de cinq jours pour les rechutes et les nouvelles lésions ;
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- le délai de mise à disposition du dossier dans le cadre de la procédure de reconnaissance des maladies professionnelles est prorogé de 20 jours.
Pour les procédures de reconnaissance des AT/MP, les délais impartis aux caisses qui expirent entre le 12 mars jusqu’à une date fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale qui ne peut être postérieure au 10 novembre 2020 inclus sont prorogés comme suit :
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- dans le cadre des procédures de reconnaissance des accidents du travail, le délai à l’issue duquel la caisse décide d’engager des investigations complémentaires ou statue sur le caractère professionnel de l’accident est prorogé jusqu’à une date fixée par arrêté ministériel, et au plus tard jusqu’au 1er décembre 2020 inclus ;
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- dans le cadre de la procédure de reconnaissance des rechutes et nouvelles lésions, le délai à l’issue duquel la caisse rend sa décision est prorogé jusqu’à une date fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, et au plus tard jusqu’au 1er décembre 2020 ;
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- dans le cadre des procédures de reconnaissance des maladies professionnelles, le délai à l’issue duquel la caisse décide de saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) ou statue sur le caractère professionnel de la maladie est prorogé jusqu’à une date fixée par arrêté ministériel, et au plus tard jusqu’au 1er décembre 2020 inclus.
Par ailleurs, les délais d’introduction des demandes d’expertises et des recours préalables d’ordre médical, qui expirent entre le 12 mars et une date fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale qui ne peut être postérieure au 10 août 2020 inclus, sont prorogés en application de l’article 2 de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020.
Enfin, les délais relatifs à la mise en œuvre de l’expertise et aux conditions d’examen des recours par la commission médicale de recours amiable (CMRA) sont, lorsqu’ils expirent entre le 12 mars et une date fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale qui ne peut être postérieure au 10 août 2020 inclus, prorogés de 4 mois.
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