Convention fiscale avec Andorre : enfin applicable en 2016
Historiquement paradis fiscal, Andorre a rejoint le concert des nations fiscales en quelques années. Andorre a levé le secret bancaire aux fins fiscales avec la signature de 22 accords d’échange d’informations puis de celle de la Convention multilatérale de l’OCDE concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, socle de l’adoption de l’échange automatique d’informations (probablement en 2018). La Principauté a ensuite introduit un impôt sur le revenu à 10% (l’IS étant déjà à 10%, comme l’impôt pour les non-résidents) et même une … TVA à 4,5%.
Restait la consécration : la signature de conventions fiscales. C’est chose faite avec la France, le 2 avril 2013, puis avec l’Espagne, le 8 janvier 2015 et probablement avec le Portugal cette année.
La convention française avec Andorre fut la dernière signée par Nicolas Sarkozy en pleine surenchère fiscale électorale, avec l’impôt à 75% proposé par le candidat Hollande et la proposition de l’introduction d’un impôt en raison de la nationalité française du candidat Sarkozy. C’est la raison pour laquelle la convention avec Andorre contient une clause susceptible de permettre à la France d’imposer les personnes physiques de nationalité française résidentes fiscales d’Andorre comme si la convention n’existait pas, à partir du moment où une telle imposition sera prévue par la loi française. Cette clause dite de « rendez-vous » prévoit que les deux Etats devront ainsi se rencontrer pour régler d’un commun accord la mise en œuvre de cette nouvelle imposition.
Soumise au parlement aux fins de ratification, le Sénat rejeta à deux reprises le texte de la convention. L’évocation de la potentialité d’un impôt sur la nationalité n’était plus acceptable. L’application de la convention pour 2015 ne put se réaliser. La convention vient donc d’être tardivement adoptée par l’Assemblée Nationale, le 6 mars 2015. Christian Eckert a rassuré : la clause de rendez-vous ne sera pas reprise dans d’autres conventions et elle ne représente pas un début de mise en œuvre d’un impôt de nationalité. Mais qui en doutait vraiment?
Techniquement, diplomatiquement et politiquement, la faisabilité d’un tel impôt a d’emblée paru ambitieuse aux techniciens.
Retenue à la source de 5% sur redevances et sur intérêts, 15% ou 5% sur dividendes, ces taux favorables devraient permettre aux nombreux fonds d’investissement andorrans de multiplier les investissements en France et inversement de faciliter l’activité des entreprises françaises dans la Principauté1. Si les revenus sont effectivement imposés entre les mains de leurs bénéficiaires et que opérateurs ne poursuivent pas comme principal objectif de bénéficier de la convention, les contribuables devraient franchir les nombreux obstacles anti abus, qui s’avèrent être une autre curiosité de cette convention du fait de leur superposition et redondance2.
Les personnes résidentes d’Andorre (du fait de leur nationalité andorrane ou de leur permis de résidence mais pas seulement) pourront se prévaloir de la convention uniquement si elles séjournent à Andorre plus de 183 jours par an, ou si elles y possèdent le centre de leurs intérêts économiques, ou, à défaut, si elles y exercent son leur activité professionnelle principale. Ainsi, les personnes résidentes fiscales d’Andorre ayant des intérêts avec la France devront apprécier les enjeux fiscaux de la résidence ou son absence au sens de la convention.
Il reste donc 9 mois aux potentiels investisseurs pour se familiariser avec le régime « patent box« , la holding de participations étrangères ou encore les SICAV d’investissements andorrans dans un contexte transfrontalier puisque la convention sera applicable à compter du 1er janvier 2016, année qui suit celle de l’échange des instruments de ratification.
Notes
1. Pour plus de précisions sur les différentes dispositions catégorielles, voir notre article précédent, « Convention fiscale avec Andorre : une ratification prochaine pour une application dès 2015« , Option Finance 08/09/2014.
2. Pour plus de détails sur les mécanismes anti-abus, voir notre précédent article « Convention fiscale signée avec la Principauté d’Andorre le 4 avril 2012 : et la citoyenneté française devient imposable« , option finance 25/06/2012 p.24/26.
Auteur
Michel Collet, avocat associé en fiscalité internationale.
*Convention fiscale avec Andorre : enfin applicable en 2016* – L’actualité fiscale en bref parue dans le magazine Option Finance le 16 mars 2015