Co-souscription et contrat d’assurance sur la vie
Dans un arrêt du 19 mars 2015, la Cour de cassation apporte une solution fiscale favorable en cas de co-souscription « décalée dans le temps » d’un contrat d’assurance sur la vie. Elle décide que la souscription conjointe de l’épouse à un contrat initialement souscrit par l’époux seul n’emporte pas novation de ce contrat.
Dès lors, la fiscalité en cas de dénouement du contrat par décès du co-souscripteur survivant, en l’espèce l’épouse, est fixée en fonction de la date de souscription initiale, sans tenir compte de la date de co-souscription : le contrat d’assurance sur la vie conserve son antériorité malgré la co-souscription en cours de contrat.
L’arrêt est fondé sur l’absence de novation, les juges du fond ayant analysé le contenu du contrat et déduit l’absence de volonté des parties de remplacer l’ancienne obligation par une nouvelle. La généralisation de cette décision à d’autres situations suppose donc que, dans l’esprit des parties, il s’agisse bien d’une adjonction d’une obligation supplémentaire à une obligation préexistante et non d’un remplacement.
Sous cette réserve, la fiscalité due au dénouement du contrat d’assurance sur la vie souscrit successivement par deux époux reste donc déterminée par la date de la souscription initiale par l’époux seul et non par la date de la co-souscription. Cette solution s’applique que les souscripteurs soient mariés – peu important alors leur régime matrimonial – ou non. En outre, elle doit être étendue à la fiscalité applicable en cas de rachat du contrat d’assurance sur la vie qui est également fonction de l’antériorité du contrat.
Cela étant, en cas de rachat, la co-souscription peut faire le lit d’une donation indirecte taxable si, dans un contexte libéral, les sommes versées profitent à celui des souscripteurs qui n’a pas ou insuffisamment financé les primes. Un tel risque n’existe cependant pas si les co-souscripteurs sont mariés sous le régime de communauté et que les primes sont acquittées avec des biens communs.
Mais dans ce dernier cas, la co-souscription par des époux avec des fonds de la communauté avec dénouement au second décès augmente la probabilité d’application de la réponse ministérielle Bacquet du 29 juin 2010 avec une réintégration dans l’actif successoral taxable de l’époux prédécédé de la moitié de la valeur de rachat du contrat non dénoué au décès. En effet du fait de la co-souscription, le contrat est maintenu malgré le décès d’un des deux souscripteurs et quel que soit l’ordre des décès. Illustration : deux époux X et Y souscrivent, dans l’hypothèse 1, conjointement un contrat d’assurance sur la vie d’une valeur de rachat de 200 et dans l’hypothèse 2, chacun un contrat d’une valeur de rachat de 100 (soit 200 pour les deux). Au décès de X, une créance de rachat de 200 est à réintégrer à l’actif de la communauté dans l’hypothèse 1 alors qu’elle n’est que de 100 dans l’hypothèse 2 (le contrat souscrit par X étant quant à lui dénoué).
En conclusion si la co-souscription est une solution à recommander puisqu’elle permet un maintien du contrat d’assurance sur la vie au profit du souscripteur survivant sans incidence fiscale négative sur la fiscalité assurance-vie, les autres conséquences patrimoniales attachées à cette co-souscription doivent être préalablement analysées.
Auteur
Sylvie Lerond, avocat Counsel, Responsable du service Droit du Patrimoine.
*Co-souscription et contrat d’assurance sur la vie* – L’actualité fiscale en bref parue dans le magazine Option Finance le 11 mai 2015