Allemagne : structuration de fonds
En Allemagne, les investissements de private equity sont le plus souvent réalisés au travers de sociétés de personnes généralement constituées sous la forme de GmbH & Co. KG, société comparable à une société en commandite simple. L’associé commandité, s’il est en cette qualité personnellement responsable des dettes sociales, prend cependant la forme d’une GmbH, forme similaire à celle d’une SARL. Les investisseurs revêtent la qualité d’associés commanditaires.
Une telle structuration permet, avant toute chose, de limiter la responsabilité des associés commandités et commanditaires au montant de leurs apports. Les investisseurs s’associent par ailleurs fréquemment au travers de fiducies qui présentent notamment pour avantage de préserver une certaine confidentialité dans un cadre juridique établi. Sur le plan fiscal, l’utilisation d’une société en commandite transparente permet d’imposer les profits directement entre les mains des associés (ou entre les mains des constituants de la fiducie). Pour ce faire, la société en commandite revêt la forme d’un fonds de gestion du patrimoine («vermögensverwaltender Fonds»), destiné à la seule gestion d’actifs financiers et à l’exclusion de toute activité commerciale.
Afin d’éviter la qualification de bénéfices industriels et commerciaux, il faut que soient impliqués dans la direction de la société, non seulement l’associé commandité («General Partner»), personnellement responsable, mais également les commanditaires personnes physiques («Limited Partners»). Cette implication des Limited Partners dans la gestion engage certes leur responsabilité, mais cet inconvénient est en pratique peu significatif, s’agissant d’une activité de gestion patrimoniale. Enfin, compte tenu de sa structuration, le fonds ne perçoit que des dividendes et des plus-values de cession de ses participations dans des sociétés cibles. Deux objectifs sont de ce fait atteints : d’une part, l’interposition de la commandite évite aux investisseurs d’apparaître directement en qualité d’investisseurs dans les sociétés cibles, ce qui préserve la confidentialité de leur investissement et, d’autre part, les investisseurs sont imposés dans les mêmes conditions que s’ils avaient réalisé un investissement direct, objectif le plus souvent recherché dans la structuration d’un fonds, quel que soit le pays concerné.
S’agissant des gérants, leur carried interest jouit depuis quelques années d’un traitement fiscal favorable. Les gains retirés par ces derniers sont, en effet, certes imposés dans les conditions de droit commun, mais après application d’un abattement de 40%. Ce régime fiscal favorable demeure toutefois une question sensible en Allemagne ainsi qu’en témoignent des discussions sur ce sujet l’année dernière au Bundestag. Il conviendra, par conséquent, d’être attentif à une éventuelle évolution législative en la matière. Sur le plan international, la qualification juridique du carried interest conditionne le traitement fiscal applicable à ces gains au regard des conventions fiscales. A ce jour, certains aspects n’ont pas encore été totalement clarifiés. Compte tenu de la persistance de zones d’incertitude, la solution consiste le plus souvent à répartir les gérants nationaux et étrangers dans des véhicules distincts. Les gérants étrangers auraient à cette occasion la possibilité de se tourner vers un véhicule transparent fiscalement, régi par leur droit national.
Enfin, un investissement par des résidents français au sein de telles structures devrait bien entendu être examiné en fonction des caractéristiques propres aux investisseurs et au fonds en cause et à la lumière des dispositions de la convention fiscale franco-allemande en sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2016.
Auteurs
François Hellio, avocat associé en fiscalité internationale
Dr. Heino Büsching, avocat associé en Corporate/Fusions & acquisitions de CMS Hasche Sigle