Activité partielle de longue durée : conseils pratiques pour renouveler la demande d’autorisation
29 novembre 2021
Les sociétés ayant recours au dispositif spécifique d’activité partielle (appelé plus communément activité partielle de longue durée « APLD ») peuvent devoir transmettre à l’administration une demande de renouvellement de l’autorisation d’activité partielle spécifique.
Vous trouverez ci-après quelques conseils pratiques pour effectuer cette demande de renouvellement. C’est également l’occasion de faire le point sur le périmètre des engagements en matière d’emploi.
Pour rappel, le dispositif spécifique d’activité partielle en cas de réduction d’activité durable peut être mis en place par accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe validé par l’administration ou par un document unilatéral de l’employeur, pris en application d’un accord collectif de branche étendu, homologué par l’administration.
En vertu du décret n°2020-926 du 28 juillet 2020 relatif au dispositif spécifique d’activité partielle en cas de réduction d’activité durable, la décision de l’administration d’homologation ou de validation vaut autorisation d’activité partielle spécifique pour une durée de six mois.
L’autorisation est, ensuite, renouvelée par période de six mois, au vu du bilan portant sur le respect des engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle et d’information des représentants du personnel sur la mise en œuvre de l’accord.
Il faut, en outre, rappeler que l’employeur doit adresser à l’autorité administrative, avant l’échéance de chaque période d’autorisation d’activité partielle spécifique de six mois, un bilan portant sur le respect des engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle et d’information des représentants du personnel sur la mise en œuvre de l’accord.
Ce bilan doit être accompagné d’un diagnostic actualisé de la situation économique et des perspectives d’activité de l’établissement, de l’entreprise ou du groupe, ainsi que du procès-verbal de la dernière réunion au cours de laquelle le comité social et économique (CSE), s’il existe, a été informé sur la mise en œuvre de l’activité partielle spécifique.
Dès lors, quels sont les principaux éléments devant figurer dans la demande de renouvellement de l’autorisation d’activité partielle spécifique ?
Diagnostic actualisé de la situation économique et des perspectives d’activité
Tout d’abord, il est nécessaire de fournir à l’administration un diagnostic actualisé de la situation économique et des perspectives d’activité de l’établissement, de l’entreprise ou du groupe en s’appuyant sur des indicateurs chiffrés.
Il est donc conseillé de reprendre les données exposées dans l’accord collectif ou le document unilatéral de l’employeur, de les actualiser et d’expliquer les évolutions ou l’absence d’évolution.
Si les perspectives d’activité se sont dégradées par rapport à celles prévues initialement dans l’accord collectif ou le document unilatéral de l’employeur, il peut être intéressant de le mettre en lumière. En effet, le décret n°2020-926 prévoit que l’administration ne peut pas demander à l’employeur le remboursement des sommes perçues pour chaque salarié placé en activité partielle spécifique et dont le licenciement pour motif économique est prononcé, pendant la durée de recours au dispositif, si les perspectives d’activité se sont ainsi dégradées.
Bilan portant sur le respect des engagements
Concernant les engagements en matière d’emploi, l’administration ne se contente pas d’une simple affirmation péremptoire du type « nous confirmons avoir respecté nos engagements en matière d’emploi ». Elle exige des éléments factuels d’évaluation. Elle souhaite, en particulier, connaître le nombre de ruptures de contrat de travail, selon le type de rupture (licenciement économique, rupture conventionnelle, démission, licenciement personnel…), sur la période d’autorisation d’activité partielle spécifique.
Il faut rappeler qu’en vertu des textes applicables en matière d’activité partielle spécifique, l’accord collectif, mettant en place ce dispositif, définit les engagements en matière d’emploi et donc leur périmètre d’application.
En effet, l’article 53 de la loi n°2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne prévoit que « L’employeur peut bénéficier de ce dispositif sous réserve de la conclusion d’un accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe ou de la conclusion d’un accord collectif de branche étendu, définissant la durée d’application de l’accord, les activités et les salariés concernés par l’activité partielle spécifique, les réductions de l’horaire de travail pouvant donner lieu à indemnisation à ce titre et les engagements spécifiquement souscrits en contrepartie, notamment pour le maintien de l’emploi ».
De même, l’article 1 du décret n°2020-926 précise que « L’accord collectif auquel est subordonné le bénéfice du dispositif spécifique d’activité partielle institué par l’article 53 de la loi du 17 juin 2020 susvisée (…) définit : (…) 4° Les engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle ».
Par ailleurs, en vertu de l’article 2 du décret n°2020-926, l’administration ne peut demander à l’employeur le remboursement des « sommes perçues » que « pour chaque salarié placé en activité partielle spécifique et dont le licenciement [pour motif économique] est prononcé, pendant la durée de recours au dispositif ».
En effet, cet accord collectif peut prévoir un recours éventuel au dispositif d’activité partielle spécifique pour une durée de 24 mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de 36 mois consécutifs et la durée de cet accord collectif peut être bien supérieure à la durée de recours au dispositif. Il faut, en -outre, souligner que le recours à l’activité partielle spécifique nécessite une autorisation de l’administration accordée par période de six mois maximum.
Il faut constater que, sur ce sujet, la rédaction du questions-réponses « activité partielle de longue durée » du ministère du Travail a évolué. Aujourd’hui, il prévoit que « Le périmètre de l’engagement de maintien dans l’emploi devra porter a minima sur les salariés placés en activité partielle de longue durée. La durée de l’engagement de maintien dans l’emploi devra correspondre a minima à la durée de recours totale au dispositif d’APLD prévue par l’accord ou le document unilatéral (y compris pendant les mois inclus dans la durée de l’accord ou du document unilatéral pour lesquels l’employeur ne dépose pas de demandes d’indemnisation) ».
Auparavant, dans la version du questions-réponses antérieure au 30 mars 2021, il était seulement précisé : « Le périmètre de l’engagement de maintien dans l’emploi devra porter a minima sur les salariés placés en activité partielle de longue durée. La durée de l’engagement de maintien dans l’emploi devra correspondre a minima à la durée de recours au dispositif d’APLD ».
Selon nous, la position administrative actuelle n’est pas conforme aux textes précités et constitue une interprétation extensive contra legem.
Lors d’échanges avec la DGEFP il nous a toutefois été précisé que « l’engagement de maintien de l’emploi doit être compris comme s’appliquant pendant la totalité du recours au dispositif prévu par l’accord, que l’entreprise ait ou pas déposé une demande d’indemnisation un mois donné. L’idée étant d’éviter que des entreprises s’abstiennent de déposer une DI un mois donné et procèdent à des licenciements économiques ce mois-là, pour, après avoir licencié, déposer de nouveau une DI au titre des mois suivants. »
Cette position est contestable. Il est certain qu’il n’est pas possible de licencier pour motif économique au cours d’une période d’autorisation d’APLD de 6 mois, que la société fasse ou non des demandes d’indemnisations (DI). Mais si une société cesse de solliciter de nouvelles demandes d’autorisation d’APLD pour les mois qui suivent et que donc elle cesse de recourir à l’APLD, il n’existe aucune raison juridique à une interdiction des licenciements économiques et à un remboursement des allocations APLD.
Concernant les engagements en matière de formation professionnelle, l’administration attend également des éléments factuels d’évaluation du type nombre de salariés formés, nombre de demandes de formation, nature des formations, intitulé des formations.
Concernant les engagements en matière d’information des représentants du personnel, il faut rappeler les dates des réunions au cours desquelles ils ont été informés sur la mise en œuvre de l’accord. Il est également nécessaire de transmettre le procès-verbal de la dernière réunion au cours de laquelle le CSE a été informé ainsi que la convocation et l’ordre du jour afférents à cette réunion.
Bilan sur la mise en œuvre de l’accord
Afin de vérifier la réduction de l’horaire de travail pour chaque salarié concerné sur la durée d’application du dispositif, l’administration exige d’obtenir un document (sous format Excel) précisant, salarié par salarié, classés par unité de travail, l’horaire mensuel habituellement applicable, le nombre d’heures chômées et le pourcentage de réduction de l’horaire de travail sur la période d’autorisation (tenant compte le cas échéant de la neutralisation jusqu’au 30 juin 2021) avec une explication des écarts éventuels entre des salariés d’une même unité de travail.
Il est important à cet égard de préciser à l’administration si vous sollicitez de pouvoir bénéficier d’une réduction de l’horaire de travail égale à 50% de la durée légale, au lieu de 40%.
Formalisme de la demande de renouvellement
Selon les départements concernés, l’administration souhaite que la demande de renouvellement prenne la forme d’un avenant à la première demande d’autorisation ou d’une nouvelle demande d’autorisation d’activité partielle spécifique.
Pour conclure, le renouvellement de la demande d’autorisation d’activité partielle spécifique nécessite de constituer un dossier complet et étayé.
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