Accepter de ne pas céder immédiatement des titres, contre une rémunération imputable sur le prix des titres, est une mauvaise opération fiscale…
M. et Mme A ont consenti une promesse unilatérale de vente portant sur les titres qu’ils détenaient dans une société X, la société bénéficiaire de cette promesse signant quant à elle une promesse unilatérale d’achat sans obligation de levée de l’option.
La promesse de vente était assortie d’un engagement par lequel M. et Mme A. consentaient à attendre un certain nombre d’années sans céder les titres en question, en contrepartie de quoi une «indemnité» leur était versée immédiatement.
A l’issue de la période de conservation des titres, deux situations pouvaient se présenter : soit la vente se réalisait et l’indemnité précédemment versée s’imputait sur le prix de cession des titres, soit la vente ne se réalisait pas et l’indemnité était conservée.
L’indemnité n’avait pas été déclarée et les époux, pour combattre le redressement, avançaient l’argument selon lequel l’indemnité réparait un préjudice et n’était donc pas imposable. Le Conseil d’Etat leur donne tort car l’«indemnité» de conservation est la rémunération d’un service rendu à la société ayant signé la promesse d’achat. Cette analyse n’est pas nouvelle mais le Conseil d’Etat prend soin ici de préciser qu’est sans incidence l’éventuelle imputation de l’indemnité sur le prix de la transaction, dès lors qu’il résultait du pacte d’actionnaires que l’indemnité était en tout état de cause acquise aux intéressés. L’indemnité est imposée en tant que bénéfice non commercial (CGI, art. 92), et ne représente donc pas le paiement anticipé du prix de vente, ce qui lui aurait permis de recevoir l’imposition favorable des plus-values.
A cette fin, le Conseil d’Etat note que les époux en question exerçaient les fonctions de directeur opérationnel et de gérante dans la société, et donc que les sommes litigieuses étaient «liées à l’activité d’ensemble, à caractère lucratif, déployée par les intéressés, en dépit du caractère unique de leur versement» (arrêt CE, 1er octobre 2015, n°368565).
Auteur
Emmanuelle Féna-Lagueny, avocat Counsel en matière d’impôts directs au sein du département de doctrine fiscale