La négociation des Non-Disturbance Agreements dans la pratique hôtelière
Les Non-Disturbance Agreements sont des accords tripartites conclus entre propriétaire, gestionnaire hôtelier et banques, destinés à assurer et encadrer la poursuite du contrat de gestion en cas d’exercice par la banque du security package. Le propriétaire doit rester vigilant pour s’assurer que la discussion de ces accords entre banque et gestionnaire ne paralyse pas le financement du projet hôtelier.
De nombreux propriétaires d’hôtels ont recours à un endettement bancaire important à l’occasion, par exemple, de l’acquisition d’un nouvel hôtel, de son ouverture ou de sa rénovation. Il est usuel, dans ces circonstances, que les prêteurs bénéficient d’un certain nombre de sûretés sur l’hôtel dont la mise en oeuvre peut bouleverser son exploitation, ce qui n’est dans l’intérêt ni de la banque, ni du gestionnaire hôtelier.
Les grandes chaînes hôtelières, principalement anglo-saxonnes, ont en conséquence intégré dans leur contrat de gestion l’obligation pour le propriétaire de soumettre la mise en place de ces financements à la conclusion préalable d’accords dénommés en pratique «Non-Disturbance Agreements» (NDA). Conclus entre le propriétaire, le gestionnaire et la banque, ils sont destinés à protéger l’opérateur en cas d’exercice des sûretés par la banque. Ayant aussi intérêt à ce que l’exploitation se poursuive, les banques en profitent pour obtenir du gestionnaire un certain nombre d’engagements spécifiques.
Ces accords contiennent une obligation réciproque d’information de la banque et du gestionnaire au titre des manquements du propriétaire et prévoient, au bénéfice de la banque, un droit de remédiation destiné à éviter une résiliation par le gestionnaire. Il arrive aussi que ce dernier bénéficie réciproquement d’un droit de remédiation auprès de la banque pour pallier la défaillance du propriétaire.
Les NDA encadrent, par ailleurs, le droit de résiliation du gestionnaire que la banque souhaite limiter. Ainsi, outre une reconnaissance et acceptation par le gestionnaire des droits de la banque au titre du security package, ils contiennent souvent l’engagement du gestionnaire de ne pas résilier le contrat de gestion au seul motif de l’exercice des sûretés ou des circonstances ayant donné lieu à cet exercice.
En conséquence de la poursuite de l’exécution du contrat de gestion malgré le défaut du propriétaire, il convient de prévoir que le gestionnaire prend ses instructions auprès de la banque ou de son représentant. Les NDA prévoient, en outre, que le gestionnaire verse les sommes normalement dues au propriétaire entre les mains de la banque.
Les conditions encadrant la cession de l’hôtel prévues par le contrat de gestion sont aménagées, qu’il s’agisse d’un asset deal ou d’un share deal. Il est en particulier prévu que l’hôtel ne peut être cédé à un tiers que si le contrat de gestion se poursuit avec ce dernier. Par ailleurs, la banque cherche habituellement à pouvoir céder le plus librement possible, i.e. sans avoir à recueillir l’approbation préalable du gestionnaire ni être contrainte de respecter un éventuel droit de préemption ou de première offre du gestionnaire. La cession à un concurrent peut faire l’objet d’un traitement particulier souvent résolu par la possibilité octroyée au gestionnaire de s’y opposer ou de résilier le contrat de gestion.
Les NDA se révèlent ainsi être des accords clés et fortement négociés, à la fois par les banques et par les gestionnaires.
Si les propriétaires sont généralement moins impliqués et intéressés à ces discussions, il convient tout de même pour eux de s’assurer que le gestionnaire et la banque parviennent à s’accorder. A défaut, le financement du projet hôtelier pourrait se trouver paralysé. Cette vigilance doit s’exercer avec une particulière acuité lorsque le contrat de gestion est conclu sous condition suspensive du financement, soit avant que les discussions avec la banque aient commencées. En effet, certains gestionnaires auront tendance à tenter de préempter autant que possible le contenu du NDA via le contrat de gestion avant que le propriétaire n’ait pu le valider avec ses banquiers. Or, si les banques anglo-saxonnes sont habituées à cette pratique, ce n’est pas nécessairement le cas des banques françaises.
Auteurs
Christophe Blondeau, avocat associé en droit des sociétés
Benoît Gomel, avocat en droit des sociétés