La fiscalité française favorise nos entrepreneurs et nos start-up !
Souvent décriée pour sa lourdeur, sa complexité et son instabilité, la fiscalité française est en réalité très favorable à l’entreprenariat. De nombreux dispositifs spéciaux permettent à une start-up de pas être étouffée par l’impôt, à un entrepreneur de bénéficier d’une fiscalité personnelle très allégée et aux investisseurs et business angels d’être incités à financer des PME. Xavier Niel aurait-il raison lorsqu’il prétend que la France est un paradis fiscal pour les entrepreneurs ? Ces dispositifs sont nombreux et s’inscrivent aujourd’hui dans un climat d’effervescence et de dynamisme autour des start-up où tout est mis en œuvre pour favoriser l’émergence de futures licornes, ces start-up dont la valorisation dépasse en quelques années d’existence le milliard de dollars. Et ça marche !
Exonérations fiscales et sociales pour les Jeunes entreprises innovantes (JEI)
Les PME indépendantes qui existent depuis moins de 8 ans et qui réalisent des dépenses de R&D à hauteur de 15 % minimum des charges fiscalement déductibles, bénéficient d’une exonération d’impôt au titre de leur premier exercice bénéficiaire. L’exonération est maintenue et s’élève à 50 % au titre de l’exercice suivant. Par ailleurs, lorsque les collectivités locales le décident, les JEI peuvent être exonérées de contribution économique territoriale pendant 7 ans.
Les JEI bénéficient aussi pendant 7 ans d’une exonération partielle de charges sociales patronales des personnels qui consacrent plus de 50 % de leur temps de travail aux projets de R&D.
Crédit d’impôt innovation et crédit d’impôt recherche : leviers de la R&D et de l’innovation
Le crédit d’impôt recherche est un des dispositifs les plus favorables au monde pour favoriser la recherche, il est utilisé aussi bien par les PME que par les plus grands groupes mondiaux. Il permet à l’entreprise d’obtenir un crédit d’impôt égal à 30% des dépenses affectées à la réalisation d’opérations de recherche fondamentale ou appliquée et de développement expérimental, quel qu’en soit le domaine.
Depuis la loi de finances pour 2013, les PME peuvent également bénéficier d’un crédit d’impôt égal à 20 % des dépenses d’innovation dans la limite de 80 000 € par an. Les dépenses éligibles sont celles nécessaires à la conception et/ou à la réalisation de prototypes ou d’installations pilotes d’un produit nouveau.
Les PME peuvent bénéficier des deux crédits d’impôt si elles exposent à la fois des dépenses de recherche et d’innovation. Par ailleurs, ces crédits d’impôt sont non seulement cumulables avec les exonérations en faveur des JEI mais peuvent en plus, sous certaines conditions, être remboursés immédiatement à l’entreprise. Un avantage non négligeable pour une entreprise qui ne paie pas d’impôt et dont l’activité consomme de la trésorerie.
Utilisation du PEA par les fondateurs pour exonérer dividendes et plus-values
Le PEA constitue un instrument de financement des entreprises bien connu des épargnants et des investisseurs mais dont l’utilisation par les entrepreneurs est sous-estimée. Le PEA, sur lequel les versements sont plafonnés à 300 000 € pour un couple (auxquels peuvent s’ajouter 150 000 € au titre d’un PEA-PME) permet d’exonérer la totalité des plus-values de cession de titres ainsi que les dividendes perçus dans la limite de 10 % par an de la valeur d’inscription des titres.
Il n’est en principe pas possible d’inscrire dans le PEA des titres déjà détenus, c’est pourquoi l’utilisation de cet outil doit être anticipée dès le début. Par ailleurs, le titulaire ne peut pas détenir une participation supérieure à 25 % des droits dans la société émettrice des titres. Sous réserve de ces limites, le PEA peut donc constituer une véritable oasis fiscale pour l’entrepreneur qui en maîtrise les règles de fonctionnement.
Attirer les talents grâce aux bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE)
Imaginés pour les start-up en croissance, les BSPCE sont attribués gratuitement par l’entreprise constituée depuis moins de 15 ans. Les bénéficiaires, salariés ou dirigeants, peuvent exercer leurs BSPCE pour souscrire une part du capital de l’entreprise à un prix définitivement fixé au jour de l’attribution des bons. En général, l’employeur prévoit un délai à respecter entre l’attribution des BSPCE et leur exercice.
Après l’exercice, les titres peuvent être conservés ou revendus pour réaliser une plus-value. C’est à ce stade que la fiscalité est particulièrement avantageuse. En effet, dès lors que le bénéficiaire a au moins 3 ans d’ancienneté dans l’entreprise, la plus-value est imposée à l’impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 19 %. En comptant les prélèvements sociaux (CSG notamment), on atteint 34,5%, ce qui reste relativement raisonnable.
Lors de leur attribution, les BSPCE sont exonérés de charges sociales patronales et salariales, un avantage non négligeable quand on sait que les classiques attributions gratuites d’actions (AGA) et stock-options subissent une contribution patronale forfaitaire de respectivement 20 % et 30 % (plus une contribution salariale de 10 % pour les stock-options).
Le financement des start-up comme outil de défiscalisation pour l’investisseur
L’une des premières préoccupations de l’entrepreneur est de trouver des financements. Pour ce faire, il peut s’appuyer sur une série d’avantages fiscaux conséquents pour convaincre les épargnants et investisseurs.
Les plus classiques sont les réductions d’impôt IR-PME et ISF-PME. Elles permettent à l’investisseur d’obtenir une réduction d’impôt proportionnelle aux sommes investies au capital d’une PME qui respecte certaines conditions. La réduction IR-PME est égale à 18 % des sommes investies (dans la limite de 100 000 € d’investissement par an pour un couple) tandis que la réduction ISF-PME s’élève à 50 % de l’investissement (dans la limite de 45 000 € de réduction d’ISF par an). La réduction IR-PME est prise en compte dans le plafonnement global des avantages fiscaux (« plafond des niches fiscales ») et la réduction d’ISF consomme le plafond de réduction utilisable pour les dons aux œuvres mais prises individuellement elles offrent déjà des avantages substantiels.
D’autres incitations existent, comme la possibilité pour les crowdlenders (investisseurs prêtant des sommes aux entreprises par l’intermédiaire de plateformes de financement participatif) de déduire de leurs revenus issus de prêts participatifs les pertes qu’ils subissent en cas de défaut d’une société emprunteuse.
…et ce n’est pas tout…
Notre système comporte d’autres dispositifs, comme l’abattement pour durée de détention renforcé sur les plus-values de cession, les fonds communs de placement dans l’innovation, le dispositif d’amortissement de l’investissement réalisé par les entreprises au capital d’entreprises innovantes (« corporate venture ») etc. Il n’est question ici que de fiscalité, mais les mesures et outils en faveur des start-up et de l’entreprenariat en général ne manquent pas. Les initiatives publiques ou privées comme le label French Tech, l’agence France Digitale et les quelques 300 incubateurs que compterait la France témoignent d’une véritable dynamique qui est en marche, alors soyons optimistes !
Auteurs
Hubert Bresson, avocat associé en fiscalité
Matthieu Lafont, avocat en fiscalité