Contrats d’assurance-vie : le Conseil constitutionnel ouvre une voie de réclamation qui n’est pas celle qui était attendue
Le Conseil constitutionnel vient de se prononcer sur l’assujettissement aux prélèvements sociaux au fil de l’eau de la part correspondant aux produits des fonds en euros des bons ou contrats d’assurance-vie en unités de compte dits « multi-supports« .
Une QPC soutenait que cette imposition annuelle (introduite par la LF pour 2011 et codifiée à l’article L. 136-7, II 3° a du Code de la sécurité sociale) méconnaît les capacités contributives du contribuable dès lors qu’elle porte sur des produits qui ne sont pas définitivement acquis par le contribuable à la date de la taxation ; mais c’est finalement une autre voie de réclamation qui s’ouvre.
Après avoir constaté que le fait générateur de l’imposition intervient au jour de l’inscription des produits des fonds en euros au contrat, alors qu’à cette date les produits ne sont pas définitifs, le Conseil rejette la critique d’inconstitutionnalité, en relevant que :
- le contribuable n’a pas à décaisser les sommes nécessaires au paiement de l’impôt puisqu’elles sont prélevées sur les produits provisoirement inscrits au contrat,
- même si la loi taxe un revenu qui n’est pas définitivement acquis à la date du fait générateur (les produits ne sont définitivement acquis qu’au jour du dénouement, par rachat ou par décès), l’imposition finalement due est seulement assise sur les produits qu’il a retirés du contrat, la loi prévoyant un mécanisme de restitution du trop-versé d’impôt applicable dès lors que le revenu définitif est inférieur aux produits déjà imposés.
Puis le Conseil émet une réserve d’interprétation, en jugeant que le contribuable doit pouvoir prétendre à des intérêts moratoires sur l’excédent d’impôt qui lui est reversé par le mécanisme de la restitution.
Il est probable qu’à l’avenir, les intérêts moratoires seront automatiquement calculés et versés par l’assureur lorsqu’il calculera la restitution due au dénouement. Jusqu’à l’institution d’une telle règle et pour le passé, les contribuables pourront adresser une réclamation à l’administration fiscale en vue d’obtenir ces intérêts moratoires.
Le montant sera toutefois assez limité :
- les intérêts sont dus au taux de l’intérêt légal, qui est faible,
- le trop perçu d’impôt à restituer (sur lequel les intérêts sont calculés) est réputé être celui qui a été acquitté au cours des années les plus récentes.
Auteur
Florent Ruault, avocat, spécialiste des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale.