À qui appartient le pouvoir de licencier au sein d’une association ?

24 juin 2015
Les associations se distinguent des sociétés commerciales en ce qu’il n’existe pas de représentant légalement défini mais uniquement des représentants désignés par les statuts de l’association. Cette spécificité rend plus délicate la détermination de la personne qui a le pouvoir de signer les lettres de licenciement et nécessite parfois d’interpréter les statuts.
Le nécessaire respect des stipulations statutaires
La Cour de cassation considère qu’au sein d’une société commerciale, à défaut de stipulations statutaires spécifiques attribuant le pouvoir de licencier à un organe déterminé, ce pouvoir appartient au représentant légal. Il s’agit, ainsi, pour une SARL de son gérant ou dans une société anonyme à conseil administration de son directeur général.
Dans plusieurs décisions, notamment des 29 septembre 2004 et 10 juillet 2013, la Haute Juridiction a estimé que le pouvoir de procéder aux licenciements entrait dans les attributions du président d’une association, sauf si les statuts conféraient ce pouvoir à un organe différent. Tel est par exemple le cas lorsque les statuts indiquent que le directeur est embauché et licencié par le conseil d’administration. Dans ce cas, la décision de licencier appartient au conseil d’administration seul.
À défaut de respecter la règle statutaire le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Certaines clauses statutaires sont difficiles à interpréter
La rédaction de certaines clauses statutaires nécessite une interprétation pour en déterminer le sens.
Dans une décision du 10 juillet 2013, il a ainsi été précisé que lorsque les statuts ou le règlement intérieur indiquent, d’une part, que le président représente l’association seul, dans tous les actes de la vie civile et a tout pouvoir à cet effet et que, d’autre part, le conseil d’administration prend toutes les décisions relatives à la gestion du personnel, cela ne signifie pas que le droit de licencier a été confié au conseil d’administration.
Dans une décision du 16 juin 2010, il a été estimé que, lorsque les statuts se contentaient de conférer au conseil d’administration le pouvoir de nommer le directeur, sans indiquer qu’il avait également le pouvoir de le licencier, il fallait considérer que ce licenciement ne pouvait être prononcé que par le conseil d’administration.
Si enfin les statuts indiquent que le pouvoir d’engager le directeur général appartient au conseil d’administration sur proposition du président sans préciser qui peut le licencier, il faut considérer que ce pouvoir appartient au Conseil d’administration. L’employeur avait en effet considéré que cette formulation ne confèrerait pas au conseil d’administration seul le droit de licencier et que ce droit appartenait par conséquent au président de l’association. La Cour de cassation a écarté cette lecture et rappelé de surcroit qu’il n’y avait pas de régularisation rétroactive possible par une décision du conseil (Décision du 17 mars 2015).
En conclusion, la détermination de l’organe compétent au sein d’une association pour procéder au licenciement est essentielle pour la validité de ce licenciement mais également pour la mise en place d’une chaîne de délégation valable, au profit, par exemple, du DRH. La rédaction des statuts doit donc sur ce point éviter les ambiguïtés et si le pouvoir est conféré au conseil d’administration, la rédaction des procès-verbaux décidant d’un licenciement ou donnant pouvoir pour procéder à un licenciement doit être claire.
Auteur
Alain Herrmann, avocat associé en droit social.
*À qui appartient le pouvoir de licencier au sein d’une association ?* – Article paru dans Les Echos Business le 24 juin 2015
A lire également
Nouvelle convention collective de la métallurgie : quelles nouveautés en matiÃ... 20 mai 2022 | Pascaline Neymond

Retrait des outils professionnels du salarié dispensé de préavis : possible m... 28 mars 2017 | CMS FL

La rupture conventionnelle : rappel des derniers enseignements jurisprudentiels... 20 octobre 2015 | CMS FL

Licenciement suite à une rupture conventionnelle refusée : pas d’incompa... 7 novembre 2013 | CMS FL
De la subjectivité de l’appréciation de la liberté d’expression du salari... 17 novembre 2016 | CMS FL

Un salarié inapte à son poste peut-il remplacer un stagiaire ?... 7 juin 2017 | CMS FL

Falsification de factures personnelles : le licenciement pour faute grave est ju... 12 mars 2019 | CMS FL

Quel montant de dommages et intérêts en cas de licenciement sans cause réelle... 8 février 2016 | CMS FL

Articles récents
- L’action en nullité d’un accord collectif est ouverte au CSE
- Complémentaire santé : vigilance sur la rédaction des dispenses d’adhésion
- Précisions récentes sur la portée de l’obligation de sécurité de l’employeur dans un contexte de harcèlement
- La jurisprudence pragmatique du Conseil d’Etat en matière de PSE unilatéral : Délimitation du périmètre du groupe (Partie I)
- Détachement, expatriation, pluriactivité : quelques nouveautés en matière de mobilité internationale
- Avenant de révision-extinction d’un accord collectif : « Ce que les parties ont fait, elles peuvent le défaire »
- Dialogue social et environnement : la prise en compte des enjeux environnementaux à l’occasion des négociations collectives d’entreprise
- L’accès de l’expert-comptable du CSE aux informations individuelles relatives aux salariés lors de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise
- Conférence : Sécuriser vos pratiques pour limiter les risques juridiques dans l’entreprise (risque pénal, congés payés, RPS)
- Le recours à un client mystère : une méthode de contrôle loyale à condition d’être transparente