Les fonds européens d’investissement de long terme arrivent !
Le Parlement européen a trouvé le 10 mars dernier un accord avec la Commission européenne sur la proposition de règlement concernant les fonds européens d’investissement de long terme (FEILT), une nouvelle catégorie de fonds d’investissement alternatif (FIA) relevant de la directive AIFM1.
Le statut de FEILT est ouvert aux seuls fonds européens dont l’actif est constitué à plus de 70% de titres de capital ou de dettes de sociétés qui ne relèvent pas de la catégorie des établissements financiers et dont les titres de capital ne sont pas cotés sur un marché réglementé, un système multilatéral de négociation ou un système organisé de négociation. S’agissant de ce critère de négociation, il fait encore l’objet de discussions et la dernière mouture du projet de règlement FEILT admet aux actifs éligibles les sociétés cotées dont la capitalisation boursière est inférieure à 500 millions d’euros.
Les FEILT sont soumis à un certain nombre de contraintes en termes de ratios similaires à celles applicables aux OPCVM relevant de directive 2009/65/CE2 (ratios de diversification, d’emprise, etc.). Toutefois, leur champ d’investissement reste particulièrement intéressant puisqu’ils peuvent investir dans des actifs physiques détenus directement ou au travers d’une société éligible et d’une valeur initiale d’au moins 10 millions d’euros (des biens immobiliers par exemple). Par ailleurs, dans le cadre de leur politique d’investissement, les FEILT peuvent consentir aux entreprises éligibles des prêts qui doivent toutefois avoir une maturité au maximum aussi longue que celle du FEILT. En contrepartie de cette faculté d’octroi de prêts, les FEILT sont soumis à des limites d’emprunt jusqu’à 30 % de leur actif et ne peuvent utiliser de tels emprunts pour les prêts qu’ils accordent.
Un FEILT ayant par définition comme objectif l’investissement sur le long terme, il ne devrait pas offrir de possibilité aux investisseurs d’obtenir le rachat de leurs parts ou actions avant son terme, ni distribuer les revenus issus de ses investissements et nécessaires à son activité. Toutefois, la dernière mouture du règlement prévoit clairement la faculté de distribution des plus-values de cession de ses actifs, voire la réduction de son capital à la suite de la cession de ses participations.
Au-delà de ces conditions tenant à la structure de leurs investissements, la particularité la plus notable des FEILT réside dans la possibilité qui leur sera offerte d’ être commercialisés en Europe par le biais du passeport auprès de clients de détail à la différence des autres formes d’AIF pour lesquels le passeport AIFM est limité aux seuls clients professionnels.
Ainsi, dans le cas où un FEILT viserait la clientèle de détail, il devrait tout d’abord s’appuyer sur un dépositaire éligible au sens de la directive UCITS V pour la conservation de ses actifs. En outre, l’investissement par les clients de détail serait soumis à un certain nombre de conditions sur la commercialisation (minimum d’investissement de 10.000 euros). Par ailleurs, l’investissement en FEILT devra être précédé d’un conseil en investissement et ne devra pas représenter plus de 10% du portefeuille d’investissements financiers du client.
Avec le FEILT, le droit européen dote la gestion d’actifs d’une nouvelle catégorie de fonds particulièrement intéressante puisqu’accessible à la clientèle de détail. Il reste donc à espérer que ces véhicules connaîtront le même succès que les UCITS.
Notes
1. Directive 2011/61/UE sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs.
2. Les UCITS.
Auteur
Jérôme Sutour, avocat associé, responsable Services Financiers.
*Les Fonds européens d’investissement de long terme arrivent !* – Analyse juridique parue dans le magazine Option Finance le 7 avril 2015