Déblocage de la participation et de l’intéressement : gare aux « pièges »
On sait que les salariés qui procèdent au blocage de leur épargne salariale pour au moins cinq ans bénéficient d’exonérations d’impôt sur le revenu (exonération de la participation et de l’intéressement, ainsi que des gains que ces sommes génèrent pendant le blocage).
On sait aussi que les députés de la majorité ont déposé et adopté une proposition de loi pour permettre aux salariés de débloquer leur épargne salariale au cours du second semestre 2013 à hauteur de 20 000 euros par bénéficiaire sans perdre les exonérations d’impôt permises par le blocage (Option finance du 22 avril 2013). Ce déblocage exceptionnel s’ajoute aux possibilités de déblocage visées par le Code du travail (mariage, divorce, rupture du contrat de travail, invalidité, ou acquisition de la résidence principale, etc.). Mais les épargnants devront mesurer les conséquences de cette nouvelle liberté.
Avoir à l’esprit que la loi ne leur permet de présenter qu’une seule demande de déblocage et que la libération des fonds est irréversible.
Se souvenir que le déblocage met fin à un avantage fiscal : la faible imposition des gains générés par l’épargne bloquée (seuls les prélèvements sociaux sont dus, et leur exigibilité est reportée au déblocage, ce qui permet de réinvestir 100 % des plus-values générées dans ce cadre).
Mesurer, enfin, les effets d’une importante modification apportée à la proposition de loi initiale : le législateur a voulu introduire un fléchage de l’épargne désinvestie vers la consommation de biens et de services en obligeant les intéressés à tenir à la disposition de l’administration fiscale des pièces justificatives de paiement pour un montant au moins égal au déblocage réalisé.
Les parlementaires n’ignorent pas le caractère très théorique de la menace (il est en effet peu probable que l’administration fiscale lance des contrôles systématiques), mais la mesure n’en est pas moins dissuasive. Pour les intéressés, la tranquillité fiscale suppose la conservation du maximum de justificatifs d’achat pour répondre sereinement à une demande qui pourrait intervenir jusqu’au 31 décembre 2016. Le législateur a été bien peu disert sur les obligations pesant sur les auteurs du déblocage. Aucune indication sur le délai dont ils disposent pour utiliser les sommes débloquées (omission de taille puisqu’ils sont autorisés à effectuer divers achats mais contraints de procéder à un seul déblocage), aucune précision sur le type d’achats à réaliser (des biens ou des services), ni sur leur nombre ou leur montant minimum ou maximum, et mutisme complet sur le type de justificatifs acceptables (encore que les débats révèlent que les facturettes auraient la même valeur probante que les factures établies en bonne et due forme).
A propos de l’auteur
Florent Ruault, avocat traite des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale. En étroite relation avec les avocats du Cabinet intervenant dans ce domaine, il suit et analyse les évolutions du droit fiscal pour formuler des conseils pratiques. Il dirige la veille, participe à l’élaboration des communiqués clients et publie des chroniques dans la presse.
Article paru dans la revue Option Finance du 10 juin 2013
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