Brexit : l’impact fiscal d’un « no deal » sur vos investissements
Trois rejets au compteur et pas le moindre consensus à l’horizon entre Theresa May et les députés britanniques sur un potentiel accord de sortie de l’Union européenne. Le « no deal » ou « Hard Brexit » reste donc aujourd’hui un scénario probable. Au-delà des répercussions sur l’économie du Royaume-Uni, il aurait également des conséquences non négligeables sur la fiscalité des particuliers.
Un ultime report au 31 octobre 2019
Après le dernier rejet par le Parlement britannique de l’accord de sortie, en date du 29 mars, Theresa May a obtenu de la part des Vingt-Sept un nouveau report du Brexit au 31 octobre 2019. Mais le « no deal » reste une hypothèse à ne pas négliger.
L’influence d’un « Hard Brexit » sur les placements immobiliers en France
Le Royaume-Uni pourrait devenir un pays tiers à l’Union européenne. En pratique, les résidents britanniques qui perçoivent des revenus immobiliers de source française ou réalisent des plus-values immobilières en France deviendraient redevables des prélèvements sociaux au taux plein de 17,2% alors que, depuis le 1er janvier 2019, ils pouvaient n’être soumis qu’au prélèvement de solidarité au taux de 7,5%. Cet allègement s’applique seulement aux personnes affiliées à un régime d’assurance-maladie dans un autre État membre de l’UE, de l’EEE ou de Suisse.
Un non évènement en matière d’exit tax
En revanche, les Français qui envisagent dans les prochains mois de s’installer au Royaume-Uni ne devraient pas être impactés en matière d’exit tax. Rappelons que ce dispositif est destiné à freiner le départ des entrepreneurs qui transfèrent leur domicile fiscal à l’étranger en imposant, sous certaines conditions, les plus-values latentes sur titres constatées par ces personnes physiques. Par le passé, il était seulement possible de bénéficier d’un sursis automatique de paiement en cas de transfert vers des pays membres de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen. Toutefois la loi de finances pour 2019 a étendu cette opportunité aux Etats ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement ayant une portée similaire à celle prévue par une directive européenne, ce qui serait le cas du Royaume-Uni.
Inquiétudes autour des investissements britanniques
Les contribuables détenant des actions britanniques dans leur plan d’épargne en actions (PEA), le cas échéant via des OPCVM, courent un risque en cas de Brexit. En théorie, la détention de titres de sociétés britanniques après le Brexit pourrait entraîner la clôture du plan. Cependant, par arrêté du 22 mars 2019 publié au JO du 24, le Gouvernement a accordé un délai de grâce (de 12, 15 ou 21 mois selon les cas) pour pouvoir céder les actions britanniques acquises avant la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. A contrario, les titres britanniques acquis à compter de la sortie de l’Union européenne ne seront plus éligibles au PEA.
Les investissements dans le capital de PME établies au Royaume-Uni vont également subir le « Hard Brexit » puisqu’ils ne devraient en principe plus ouvrir droit à la réduction d’impôt sur le revenu « Madelin ». La loi prévoit en effet que cette réduction d’impôt est réservée aux contribuables qui réalisent des souscriptions au capital des sociétés ayant leur siège au sein d’un Etat membre de l’Union européenne ou dans un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. En outre, l’administration fiscale pourrait être tentée de remettre en cause les réductions d’impôt sur le revenu accordées en raison des investissements réalisés par le passé dans des sociétés établies au Royaume-Uni dans la mesure où la condition de localisation du siège social doit être satisfaite de manière continue durant cinq ans.
A ce titre, contrairement à ce que le Gouvernement a pu faire en matière de PEA, aucune mesure transitoire n’a été adoptée afin d’éviter que les contribuables n’aient pas à payer les pots cassés de cette difficile séparation.
Enfin, il n’est pas inutile de préciser qu’un Brexit dur pourrait complexifier les démarches des résidents fiscaux français bénéficiaires de revenus mobiliers payés par un établissement bancaire situé au Royaume-Uni. En effet, les bénéficiaires de dividendes payés hors de l’Union européenne doivent déclarer eux-mêmes les revenus mobiliers encaissés et acquitter le montant des prélèvements qui doivent être retenus sur les dividendes.
Il semble toutefois que cette saga n’en soit pas à son dernier rebondissement.
Auteurs
Annabelle Bailleul-Mirabaud, avocat associé, fiscalité internationale
Adea Meidani, avocat, fiscalité internationale
Brexit : l’impact fiscal d’un « no deal » sur vos investissements – Article paru dans Le Revenu le 25 avril 2019
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