Contrôles fiscaux : de nouvelles garanties pour le contribuable ?
Le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance a été adopté en lecture définitive par l’Assemblée Nationale le 31 juillet 2018. Outre l’affirmation d’un principe général du droit à l’erreur (les mesures qui s’y rapportent vous ont été présentées sur Lexplicite)1, il consacre un « droit général au contrôle » et l’opposabilité des résultats de ces contrôles aux administrations qui les ont réalisés.
Si la loi est promulguée dans les mêmes termes, ce dispositif se traduira par les nouvelles garanties suivantes pour les contribuables en matière fiscale :
- L’inscription dans la loi2 du dispositif de « rescrit contrôle » déjà prévu par la doctrine administrative . Ce dispositif permet au contribuable vérifié de demander à l’administration3 (en cours de contrôle et avant envoi de toute proposition de rectification), de formaliser sa position sur un point qu’elle a examiné dans le cadre d’une vérification ou d’un examen de comptabilité, n’ayant fait l’objet d’aucune rectification.Toutefois, comme les travaux parlementaires l’indiquent (et à l’instar de ce que prévoit la doctrine administrative), le vérificateur pourra « apprécier les points sur lesquels il peut prendre position » et cette prise de position ne pourra intervenir « qu’à la condition que le vérificateur ait examiné de manière suffisamment approfondie les éléments nécessaires à une appréciation complète et correcte de la situation ».
- L’assimilation de l’absence de rehaussement sur un point examiné lors du contrôle, à une prise de position opposable de l’administration. Tout point examiné lors d’un examen de comptabilité, une vérification de comptabilité ou un examen de la situation fiscale personnelle (ESFP), faisant suite à un avis adressé à compter du 1er janvier 2019, et n’ayant pas donné lieu à un redressement sera considéré comme tacitement validé par l’administration fiscale. A cet effet, la proposition de rectification ou l’avis d’absence de redressement devra désormais mentionner l’ensemble des points examinés, qu’ils aient ou non donné lieu à rehaussement.Là encore, il ressort des travaux parlementaires que le vérificateur décidera des points qui seront mentionnés dans la liste et, ainsi, de la portée de la garantie. On peut en outre s’interroger sur la façon dont ce dispositif s’articulera avec le dispositif du « rescrit contrôle ».
- L’instauration, à titre expérimental (pour une durée de 4 ans4), dans les régions Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes, d’une durée cumulée maximum de 9 mois par période de 3 ans des contrôles (sous certaines exceptions) pouvant être menés par les administrations5 à l’encontre de chaque établissement d’une même entreprise. Cette mesure concerne les entreprises de moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 M€. Ses modalités d’application seront précisées par un décret en Conseil d’Etat.
- L’extension aux contrôles « sur pièces » (effectués du bureau par l’administration) de la possibilité pour le contribuable de solliciter un recours hiérarchique dans le cadre du débat oral et contradictoire Cette disposition s’appliquera à compter de la publication de la loi.
- Enfin, le législateur habilite le gouvernement à encadrer, par voie d’ordonnance, dans un délai de 9 mois à compter de la publication de la loi, le mécanisme de la « relation de confiance » actuellement expérimenté entre quelques entreprises et l’administration fiscale.
Les modalités de mise en œuvre de ces nouvelles garanties mériteront d’être examinées avec attention pour en évaluer la portée et l’intérêt pratique pour les entreprises.
Notes
1 Voir Droit à l’erreur en matière fiscale : de nouvelles possibilités de régularisation !, 30 juillet 2018
2 Pour les contrôles dont les avis seront adressés à compter de la publication de la loi
3 BOI-CF-PGR-30-20-20120912, n°10 et suivants
4 A compter de l’entrée en vigueur du décret en Conseil d’Etat
5 i.e. les administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, leurs établissements publics administratifs et les organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d’une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale ( cf. art. L 100-3 du code des relations entre le public et l’administration)
Auteurs
Christophe Leclère, avocat en droit fiscal chez CMS Francis Lefebvre Avocats
Adrien Sanvelian, avocat en droit fiscal chez CMS Francis Lefebvre Avocats