La Cour de justice de l’Union européenne précise la notion de « service de médias audiovisuels »
Par un arrêt du 21 février 2018 (CJUE, 21 février 2018, C-132/17), la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a décidé que la définition de « service de médias audiovisuels » au sens de la directive 2010/13/UE du 10 mars 2010 relative auxdits services « ne couvre ni une chaîne de vidéos (…) sur laquelle les utilisateurs d’Internet peuvent consulter de courtes vidéos promotionnelles […], ni une seule de ces vidéos prises isolément ».
Dans cette affaire, la qualification de « service de médias audiovisuels » n’était pas invoquée pour imposer l’application de la réglementation relative à ces services mais pour échapper à celle d’une réglementation concurrente. En l’espèce, Peugeot Deutschland avait mis en ligne sur sa chaîne YouTube une courte vidéo de 15 secondes promouvant l’un de ses modèles de véhicules dans laquelle elle ne mentionnait ni la consommation de carburant ni les émissions de CO2 dudit véhicule. Ce faisant, elle ne respectait pas les prescriptions de la loi allemande transposant la « directive 1999/94 du 13 décembre 1999. Toutefois, conformément à l’article 9 de cette directive, la Commission européenne avait publié le 26 mars 2003 une recommandation dans laquelle elle indiquait que cette réglementation ne s’appliquait pas aux services de radiodiffusion télévisuelle (qui ont été inclus depuis dans les services de médias audiovisuels).
La Cour était donc interrogée sur la notion de « service de médias audiovisuels » telle que définie dans la directive 2010/13 du 10 mars 2010, laquelle couvre, d’une part, un service « dont l’objet principal est la fourniture de programmes dans le but d’informer, de divertir ou d’éduquer le grand public, par des réseaux de communications électroniques », et, d’autre part, une communication commerciale audiovisuelle qui correspond aux images destinées à promouvoir les produits, les services ou l’image d’une personne qui « accompagnent un programme ou y sont insérées moyennant paiement ou autre contrepartie, ou à des fins d’autopromotion ».
Elle a décidé qu’une chaîne YouTube communiquant des vidéos promotionnelles et ces vidéos prises isolément ne constituaient ni un service décrit dans la directive 2010/13 (car elles n’ont pas pour objet d’informer, de divertir ou d’éduquer le grand public), ni une communication commerciale audiovisuelle (car elles n’accompagnent pas un programme ni sont insérées dans un programme).
Cette décision tient essentiellement à la nature promotionnelle de la vidéo litigieuse. Dans une autre affaire, la CJUE a pu apprécier de manière large la notion de « service de médias audiovisuels ». Elle considère en effet que peut constituer un tel service la mise à disposition de vidéos de courte durée dans le cadre de la version électronique d’un journal dès lors que ce service a un contenu et une fonction autonomes par rapport à ceux de l’activité journalistique de l’éditeur dudit site Internet (CJUE, 21 octobre 2015, C-347/14).
En France, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a, de son côté, qualifié de service de médias audiovisuels à la demande soumise à son contrôle une chaîne YouTube proposant des vidéos de divertissement sur le thème culinaire et a mis en garde son éditeur à propos de manquements à la règlementation sur la promotion de l’alcool (CSA, assemblée plénière, 9 novembre 2016).
Rien n’empêche donc a priori une chaîne YouTube proposant des vidéos de divertissement ou d’information (plutôt que des vidéos promotionnelles) d’être considérée comme un « service de médias audiovisuels ».
Auteur
Florentin Sanson, avocat, droit de la propriété intellectuelle