Le régime indemnitaire applicable au raccordement aux réseaux publics des ouvrages de production d’électricité en mer
Le décret n°2018-222 du 30 mars 2018 est pris en application des articles L.342-3, alinéa 5, et L.342-7-1 du Code de l’énergie issus de la loi n°2017-1839 du 30 décembre 2017, mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement.
Il fixe le montant et les modalités d’indemnisation des producteurs d’électricité en mer à partir de sources d’énergie renouvelable, lorsque, en cas de procédure de mise en concurrence prévue à l’article L.311-10 du Code de l’énergie, le coût du raccordement est supporté par RTE et que les modalités d’indemnisation ne sont pas prévues par le cahier des charges de ladite procédure. On ajoutera immédiatement que cette dernière éventualité paraît improbable : le décret établit plutôt un standard dont les auteurs des cahiers des charges s’inspireront pour l’essentiel, quitte à tenir compte des particularités de tel ou tel projet pour s’en écarter.
Il s’agit donc d’un nouveau régime indemnitaire, inspiré de l’expérience de divers autres pays européens, nettement en avance sur la France dans ce secteur.
Le développeur du projet sera ainsi indemnisé en cas de retard dans les travaux de raccordement du parc au réseau public de transport. Par la suite, le producteur le sera également en cas d’avarie ou de dysfonctionnement affectant aussi bien la partie terrestre que la partie maritime des ouvrages de raccordement.
Les modalités d’indemnisation sont voisines dans ces deux situations. Dès lors qu’un retard ou une avarie est constaté, le producteur est indemnisé chaque mois à hauteur de 80% de la perte financière correspondant à l’électricité qui n’a pu être évacuée le mois précédent. Au plus tard sept mois après la fin des travaux de raccordement ou la fin de l’avarie, le producteur est indemnisé à hauteur de 90% de ses pertes financières, dûment justifiées : une franchise de 10% reste donc à sa charge. L’indemnisation en cas de retard ne peut être versée pendant plus de trois ans. Il existe par ailleurs une franchise pour les avaries et les dysfonctionnements : l’indisponibilité totale ou partielle des ouvrages doit excéder une durée cumulée, exprimée en équivalent pleine puissance maximale de l’installation, supérieure à dix jours dans les cinq années suivant la prise d’effet du contrat d’obligation d’achat ou de complément de rémunération, trente jours pendant les dix années suivantes et quarante-cinq jours au-delà .
Dans son avis du 15 février 2018, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) recommandait notamment que le gestionnaire de réseau soit exonéré de sa responsabilité au titre des retards de raccordement lorsque des recours contentieux ont été déposés contre les décisions autorisant les ouvrages de raccordement et qu’aucune indemnisation ne soit due après trois ans d’avarie ou de dysfonctionnement. Le Premier ministre ne l’a pas suivie.
Enfin, il importe de souligner que ce mécanisme d’indemnisation doit être distingué de celui mis en place par le décret n°2017-628 du 26 avril 2017, pris en application de l’article L.342-3, alinéa 4, du Code de l’énergie. Le dispositif prévu par ce décret du 26 avril 2017 concerne les situations dans lesquelles le producteur sélectionné après mise en concurrence supporte les coûts de raccordement: c’est l’ancien dispositif. Il concerne en particulier les six parcs éoliens en mer attribués en 2012 et 2013.
Auteur
Marc Devedeix, avocat, droit de l’énergie