Démissionnaire forcé, salarié licencié : même exonération fiscale !
L’indemnité versée à l’occasion d’une démission peut bénéficier du régime fiscal des indemnités de licenciement si la démission en revêt le caractère.
Traditionnellement, le Conseil d’Etat réservait aux seules indemnités limitativement énumérées par l’article 80 duodecies du CGI les exonérations, totales ou partielles, prévues par ce texte. Mais le Conseil constitutionnel, lorsqu’il a jugé cet article conforme à la constitution, a posé une réserve d’interprétation qui en modifie très sensiblement la portée puisqu’il juge que les dispositions de cet article ne sauraient conduire à ce que le bénéfice de ces exonérations varie selon que l’indemnité a été allouée en vertu d’un jugement, d’une sentence arbitrale ou d’une transaction.
Le Conseil d’Etat applique aujourd’hui pour la première fois le principe dégagé par le Conseil constitutionnel (arrêt CE du 24 janvier 2014 n° 352949).
Dans l’affaire en cause, un salarié estimait qu’il avait été « contraint » de démissionner. La somme reçue en réparation de son préjudice devait donc, selon lui, recevoir le même traitement fiscal que la somme qu’il aurait eu toutes les chances de percevoir du juge, au titre d’une indemnité de licenciement si, au lieu d’accepter la transaction, il avait porté le litige devant les tribunaux.
Le Conseil d’Etat lui donne raison sur le principe, puisqu’il juge que les sommes perçues à l’occasion d’une démission peuvent être regardées comme des indemnités de licenciement et être ainsi exonérées d’impôt dans les limites prévues par l’article 80 duodecies du CGI précité s’il est établi que cette démission, en raison des conditions dans lesquelles elle a été donnée, revêt le caractère d’un licenciement.
Mais le Conseil d’Etat lui donne tort en pratique car le salarié ne pouvait faire état que d’un différend vieux de plus de deux ans avec son employeur, et n’avait présenté sa démission qu’après avoir eu l’assurance de pouvoir prendre sa retraite immédiatement après avoir quitté l’entreprise.
S’il avait réussi à prouver que sa démission déguisait en réalité un licenciement, celui-ci aurait été regardé comme sans cause réelle et sérieuse et les indemnités correspondantes auraient été exonérées sans limitation, faute pour l’employeur d’avoir adressé à son salarié un courrier suffisamment motivé.
A propos de l’auteur
Emmanuelle Féna-Lagueny, avocat. Elle traite des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale. En étroite relation avec les avocats du Cabinet intervenant dans ce domaine, elle suit et analyse les évolutions du droit fiscal pour formuler des conseils pratiques.
Actualité fiscale en bref parue dans la revue Option Finance du 17 février 2014