Refus de garantie de l’assureur dommages-ouvrage en présence d’une déclaration de sinistre intervenue dans les deux ans de l’expiration de la garantie décennale
Une police dommages-ouvrage avait été souscrite afin d’assurer les travaux d’extension d’un bâtiment. Lesdits travaux avaient été réceptionnés le 25 octobre 2001. Le 13 juillet 2011, l’assuré avait déclaré un sinistre relatif à des désordres affectant le dallage de l’extension. Face au refus de garantie de l’assureur, il avait formé une demande d’expertise judiciaire. Au cours de celle-ci, il avait procédé à deux nouvelles déclarations de sinistres les 12 et 28 août 2013. Ces dernières étaient établies sur la base de deux rapports d’audit en date des 15 et 19 septembre 2011, soit des rapports antérieurs à l’expiration de la garantie décennale.
L’assureur lui avait alors notifié un refus de garantie en raison du caractère tardif des déclarations, effectuées après l’expiration du délai décennal qui rendait tout recours subrogatoire de sa part impossible. En retour, il l’avait assigné en paiement.
La Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir rejeté la demande de l’assuré.
Elle rappelle, dans un premier temps, la jurisprudence, découlant de l’article L.114-1 du Code des assurances, aux termes de laquelle l’assuré est en droit de déclarer un sinistre dans les deux ans de sa révélation, et ce même après expiration de la garantie (Cass. 1e civ., 4 mai 1999, n°97-13.198 ; Cass. 1e civ. 29 avril 2003, n°00-12.046 ; Cass. 3e civ., 19 mai 2016 n°15-16.688). Toutefois, elle ajoute que cette possibilité ne dispense pas l’assuré « de respecter l’obligation de diligence que sanctionne l’article L.121-12 du code des assurances » et qu’en l’espèce, la privation du recours subrogatoire de l’assureur dommages-ouvrage résultait du retard de l’assuré dans la déclaration des sinistres.
S’il est conforme à la lettre de l’article L.121-2 alinéa 2 du Code des assurances permettant de décharger, en tout ou partie, l’assureur de sa responsabilité envers l’assuré lorsque la perte du recours subrogatoire résulte du fait de l’assuré, cet arrêt -qui fera l’objet d’une publication au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation- vient donc restreindre significativement le champ d’application de la jurisprudence antérieure.
Aussi, s’il offre une éventuelle échappatoire aux assureurs dommages-ouvrage confrontés à des déclarations de sinistres postérieures à la disparition de leur recours subrogatoire, cet arrêt doit inciter, parallèlement, les assurés à procéder à leurs déclarations de sinistres avec la plus grande promptitude.
Cass. 3e civ., 8 février 2018, n° 17-10.010
Auteur
Christelle Labadie, Professional support lawyer