Vente et transformation en logements : une opportunité fiscale prorogée pour les entreprises
La loi de finances pour 2018 a prorogé l’application du dispositif de l’article 210 F du Code général des impôts (CGI) moyennant toutefois quelques aménagements.
Le régime permet aux entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) de bénéficier d’un taux réduit de 19% sur la plus-value de cession de certains actifs immobilisés : leurs locaux à usage commercial, industriel, ou de bureau.
Jusqu’à présent, il devait prendre fin au 31 décembre 2017. L’article 25 de la loi de finances le proroge aux cessions réalisées entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2020, ou au plus tard le 31 décembre 2022 si elles font suite à des promesses conclues entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2020.
Le législateur répond aux attentes du secteur en manque de logements sans toutefois prendre en considération certaines critiques. Il est utile de préciser qu’il suppose notamment que le cessionnaire soit soumis à l’IS dans les conditions de droit commun, ce dernier devant s’engager à transformer les locaux en logements dans un délai de quatre ans à compter de la date de clôture de l’exercice d’acquisition. Or, la pénalité de 25% du prix de cession due par le cessionnaire en cas de non-respect de son engagement n’a pas été assouplie et le caractère disproportionné de cette sanction peut encore constituer un frein.
En revanche, il a été fait droit à la demande récurrente de permettre au cessionnaire d’être une société civile de construction vente bénéficiant du régime de la translucidité fiscale de l’article 239 ter du CGI. On relèvera également que deviennent éligibles les ventes de terrains nus, susceptibles d’être considérés comme des terrains à bâtir au sens de la TVA.
Néanmoins, le champ d’application du dispositif ne sera pas aussi étendu que pressenti car ces modifications s’accompagnent d’une limitation aux seules ventes d’immeubles situés « dans des zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre particulièrement important entre l’offre et la demande de logements ».
Cette restriction pose encore question au moment où nous publions ce numéro spécial : la loi n’est pas plus précise et ne renvoie pas à un texte règlementaire le soin de définir les secteurs géographiques concernés.
A ce jour, aucun commentaire de l’administration fiscale n’a été publié à ce sujet et il est important que ce point soit rapidement levé pour donner rapidement son plein effet à la mesure de prorogation.
Dans les négociations en cours entre opérateurs on doit au moins pouvoir affirmer que sont concernées les zones A et A bis, telles que définies par l’arrêté du 1er août 2014 pris en application de l’article R 304-1 du Code de la construction et de l’habitation.
En effet, ces zones ont été explicitement citées au cours des débats parlementaires dans le rapport général fait au nom de la commission des finances du Sénat («reprenant les termes de l’article 234 du Code général des impôts relatifs à la taxe sur les logements de petites surfaces (dite taxe « Apparu »), le présent article viserait a priori les biens situés dans les zones A bis et A»).
De même, la terminologie du déséquilibre « particulièrement » important figure dans un autre texte : l’article 28 de la loi de finances rectificative pour 2017 relatif au dispositif exceptionnel d’abattement sur les plus-values immobilières pour les particuliers. Or, un arrêté du 29 décembre 2017, pris en application de cette loi, indique ces deux secteurs géographiques. Par analogie il devrait donc en être de même pour l’article 210 F. Si ceci venait à être confirmé par les commentaires administratifs à paraître, on pourra regretter que les communes visées ne soient au moins similaires à celles éligibles au dispositif Pinel.
Auteur
Christophe Frionnet, avocat associé en droit fiscal