Vers une révision des règles européennes sur l’open data ?
On le savait, l’ouverture des données publiques est une tendance de fond.
L’Union européenne s’était emparée du sujet dès 2003, avec la publication d’une première directive consacrée au sujet (directive 2003/98 du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public), puis avait modernisé le régime applicable avec la directive 2013/37 du 26 juin 2013.
La France a transposé la 2e directive dans une loi n°2015-1779 du 28 décembre 2015, complétée par trois décrets parus en 2016 (pour en savoir plus sur ce dispositif, vous pouvez consulter notre article du 14 février 2017). La loi n°2016-1321 du 7 octobre 2016 dite « loi Lemaire » a complété l’édifice en prévoyant l’ouverture de certains types de données, notamment celle des décisions de justice.
Pour autant, « pas de repos pour les braves ». Alors que les dispositifs en vigueur sont encore en rodage, et que d’autres mesures attendent des décrets ou des arrêtés d’application, la Commission européenne remet déjà sur le métier la directive de 2013.
En effet, elle a lancé, le 19 septembre 2017, une consultation publique sur le réexamen de la directive concernant la réutilisation des informations du secteur public. Cette consultation s’est déroulée jusqu’au 12 décembre 2017, et ses conclusions ne sont pas encore connues. Par ailleurs, la Commission n’a pas, dans le cadre de cette consultation publique, soumis un pré-projet de texte, elle s’est bornée à poser aux participants un certain nombre de questions.
Deux éléments avaient néanmoins été présentés par la Commission, qu’elle souhaitait plus particulièrement voir explorés :
- L’accessibilité et la réutilisation des données obtenues au moyen de fonds publics, même par des personnes privées ;
- Le statut à conférer aux données privées présentant un intérêt public.
Ainsi, il semblerait que l’un des axes de travail de la Commission consiste à envisager comme des données devant être rendues accessibles ou réutilisables les données privées présentant un intérêt public et/ou ayant été obtenues avec le concours d’aides publiques.
A ce stade, il n’est pourtant pas dit que ces réflexions se concrétiseront dans la future réforme européenne. En effet, la Commission avait déjà indiqué que « l’accès aux données à caractère non personnel et leur réutilisation dans un contexte d’entreprise à entreprise sont traités au cas par cas par les entreprises entre elles, sur une base contractuelle. Sur la base de la consultation publique à la suite de la communication ‘Créer une économie européenne fondée sur les données’, la Commission cherche à déterminer si l’absence d’un cadre clair pour l’accès aux données à caractère non personnel bride l’innovation et la croissance, en particulier pour les PME, et si des initiatives sont nécessaires pour promouvoir à l’égard de ces données des conditions d’accès et d’utilisation équitables et équilibrées » (communication COM(2017)28 du 10 mai 2017 sur l’examen à mi-parcours de la mise en œuvre de la stratégie pour le marché unique numérique). Il s’agit d’approfondir la réflexion sur le sujet, et d’envisager ce qui pourrait ou devrait être fait.
Par ailleurs, et plus classiquement, la Commission a souhaité, en consultant largement le public, mieux comprendre comment avaient été reçues les directives déjà en vigueur, quels pourraient être les points de blocage du dispositif actuel et, partant, définir des orientations pour sa réforme.
Ainsi, ces premiers éléments ne permettent pas, à ce stade, de déterminer ce que sera la directive « open data 3 ». L’avenir nous dira si une proposition de directive est présentée, dans la continuité de cette consultation.
Auteurs
Anne-Laure Villedieu, avocat associée, droit de la propriété industrielle, droit de l’informatique, des communications électroniques et protection des données personnelles.
Hélène Chalmeton, juriste au sein du Département droit des affaires, en charge du knowledge management