Ordonnances Macron : les nouvelles incidences de l’appartenance à un groupe
16 janvier 2018
La notion de groupe en droit du travail n’est pas uniforme et donne lieu à des obligations de nature très diverse. Si les ordonnances Macron du 22 septembre 2017 n’ont pas porté l’ambition d’une unification de cette notion et son régime, elles contiennent néanmoins des évolutions importantes pour les entreprises appartenant à un groupe1.
La plus significative de ces mesures concerne le nouveau périmètre d’appréciation du motif économique de licenciement : tenant compte de la concentration des entreprises et de l’internationalisation de l’économie, la Cour de cassation avait décidé de ne pas se limiter au contrôle de la situation de l’entreprise employeur mais d’apprécier la réalité et le sérieux du motif économique en prenant en considération le secteur d’activité du groupe auquel celle-ci appartenait1.
Fort du constat que cette mesure protégeait moins l’emploi qu’elle affaiblissait l’attractivité de la France auprès des investisseurs, la loi prévoit dorénavant que « les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise s’apprécient au niveau de cette entreprise si elle n’appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d’activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national »3. Et le texte de renvoyer à la notion de groupe pour le comité de groupe (soit par référence au droit commercial) et, lorsque la société dominante n’est pas située en France, à la notion peu explicite d’« ensemble des entreprises implantées sur le territoire français ».
Un complément devrait être enfin apporté à la loi pour réserver les cas de fraude.
Les modifications concernant à présent l’obligation de reclassement relèvent de la même volonté de recentrage sur le territoire national. Ainsi la recherche de reclassement doit-elle dorénavant intervenir en France au sein des sociétés appartenant à un groupe (au sens précité retenu pour le comité de groupe) et, condition supplémentaire issue de la jurisprudence, « dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel »4.
Ce faisant la loi met un terme à la jurisprudence qui avait étendu cette obligation aux réseaux de franchises par exemple et conforte l’exclusion du champ de cette obligation des fonds qui gèrent des participations sans prendre part à la politique de gestion du personnel des sociétés concernées.
Notes
1 Lesquelles, selon l’Insee emploient plus de la moitié des salariés du secteur privé.
2 Cass. soc., 5 avril 1995, n°93-43.866.
3 Article L.233-3 du Code de commerce.
4 Article L.1233-4 du Code du travail.
Auteur
Pierre Bonneau, avocat associé en droit social
Ordonnances Macron : les nouvelles incidences de l’appartenance à un groupe – Article paru dans La Lettre des Fusions-Acquisitions et du Private Equity, supplément n°1441 du magazine Option Finance du 11 décembre 2017
A lire également
Stages à l’étranger : quelle protection ?... 29 mai 2015 | CMS FL
La préservation de l’identité et de la réputation du réseau de franchise p... 4 avril 2018 | CMS FL
Fiscalité de la SLP dans un contexte international... 11 janvier 2016 | CMS FL
Cessions d’entreprises en difficulté : typologie des risques en droit social... 1 octobre 2018 | CMS FL
La QPC en droit du travail 10 septembre 2013 | CMS FL
Brexit : des annonces fortes pour renforcer l’attractivité de la place de Par... 17 octobre 2017 | CMS FL
Portée de l’interdépendance des contrats... 12 octobre 2016 | CMS FL
Un contrat de franchise examiné à l’aune du déséquilibre significatif... 17 avril 2018 | CMS FL
Articles récents
- L’action en nullité d’un accord collectif est ouverte au CSE
- Complémentaire santé : vigilance sur la rédaction des dispenses d’adhésion
- Précisions récentes sur la portée de l’obligation de sécurité de l’employeur dans un contexte de harcèlement
- La jurisprudence pragmatique du Conseil d’Etat en matière de PSE unilatéral : Délimitation du périmètre du groupe (Partie I)
- Détachement, expatriation, pluriactivité : quelques nouveautés en matière de mobilité internationale
- Avenant de révision-extinction d’un accord collectif : « Ce que les parties ont fait, elles peuvent le défaire »
- Dialogue social et environnement : la prise en compte des enjeux environnementaux à l’occasion des négociations collectives d’entreprise
- L’accès de l’expert-comptable du CSE aux informations individuelles relatives aux salariés lors de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise
- Conférence : Sécuriser vos pratiques pour limiter les risques juridiques dans l’entreprise (risque pénal, congés payés, RPS)
- Le recours à un client mystère : une méthode de contrôle loyale à condition d’être transparente