Réforme Macron : la nouvelle et salutaire prévisibilité de l’indemnisation du salarié par le conseil de prud’hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse
1 décembre 2017
L’ordonnance du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail a instauré un barème impératif d’indemnisation du salarié en cas de licenciement sans cause réelle ou sérieuse.
En France, si le juge décide que le licenciement d’un salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse, il peut :
- proposer la réintégration du salarié dans la société. Toutefois, employeur et/ou salarié sont libres de la refuser ;
- ou accorder au salarié une indemnité à la charge de l’employeur. Désormais, le juge doit faire application d’un barème impératif et octroyer une indemnité dont le montant est compris entre des montants planchers et plafonds, fixés en fonction de l’ancienneté du salarié.
Par exemple, un salarié ayant 10 ans d’ancienneté dans la société se verra octroyer une indemnité nécessairement comprise entre 3 mois de salaire minimum et 10 mois de salaire maximum. Un salarié ayant 2 ans d’ancienneté se verra octroyer une indemnité comprise entre 3 et 3,5 mois de salaire alors qu’auparavant le code du travail lui garantissait une indemnité ne pouvant être inférieure au salaire des 6 derniers mois s’il était employé dans une société d’au moins 11 salariés.
S’agissant des petites sociétés qui emploient habituellement moins de 11 salariés, l’ordonnance prévoit des planchers inférieurs, les plafonds restant identiques.
L’instauration de ce barème introduit une plus grande visibilité, pour les sociétés, du coût d’un contentieux afférent au licenciement d’un salarié. Il pourrait conduire à une diminution des saisines du conseil de prud’hommes notamment lorsque le salarié estime que l’indemnité maximale qu’il pourrait espérer obtenir ne mérite pas d’engager des frais de procédure.
Ce barème n’est toutefois pas applicable lorsque le juge constate la nullité du licenciement, par exemple en cas de harcèlement moral ou sexuel ou de licenciement discriminatoire. Ainsi, il est probable que les conseils de salariés tentent, souvent, de plaider sur ce terrain-là.
Enfin, l’employeur qui négocie avec un salarié une transaction pour mettre un terme à toute contestation liée au motif du licenciement doit évidemment s’aider du barème pour déterminer le montant de l’indemnité transactionnelle versée dans le cadre de cette transaction. Pourquoi, par exemple, octroyer au salarié une indemnité transactionnelle supérieure au plafond du barème, plafond que le salarié ne serait même pas certain d’obtenir en cas de victoire après de longs mois de procédure ? Nul doute que ces négociations transactionnelles vont prendre un nouveau tournant.
Auteurs
Guillaume Bossy, avocat associé, droit social, CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon
Aude Poirier, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon, droit social
A lire également
Le cumul des indemnités de rupture du contrat de travail, est ce possible ?... 16 juin 2017 | CMS FL
Les véhicules d’investissement immobilier après la loi Macron... 8 décembre 2015 | CMS FL
Confirmation du caractère confidentiel de la procédure de transaction... 9 novembre 2017 | CMS FL
Retrait des outils professionnels du salarié dispensé de préavis : possible m... 28 mars 2017 | CMS FL
Classement en invalidité porté à la connaissance de l’entreprise : une ... 7 mai 2014 | CMS FL
Que peuvent attendre les entreprises de la loi El Khomri ?... 17 octobre 2016 | CMS FL
Contentieux des contrats de gérance de succursale : compétence commerciale ou ... 31 juillet 2015 | CMS FL
La société de libre partenariat 19 octobre 2015 | CMS FL
Articles récents
- L’action en nullité d’un accord collectif est ouverte au CSE
- Complémentaire santé : vigilance sur la rédaction des dispenses d’adhésion
- Précisions récentes sur la portée de l’obligation de sécurité de l’employeur dans un contexte de harcèlement
- La jurisprudence pragmatique du Conseil d’Etat en matière de PSE unilatéral : Délimitation du périmètre du groupe (Partie I)
- Détachement, expatriation, pluriactivité : quelques nouveautés en matière de mobilité internationale
- Avenant de révision-extinction d’un accord collectif : « Ce que les parties ont fait, elles peuvent le défaire »
- Dialogue social et environnement : la prise en compte des enjeux environnementaux à l’occasion des négociations collectives d’entreprise
- L’accès de l’expert-comptable du CSE aux informations individuelles relatives aux salariés lors de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise
- Conférence : Sécuriser vos pratiques pour limiter les risques juridiques dans l’entreprise (risque pénal, congés payés, RPS)
- Le recours à un client mystère : une méthode de contrôle loyale à condition d’être transparente