Anneaux olympiques : précisions sur la contrefaçon d’une marque notoire
Douce tentation pour certaines entreprises, la pratique de se mettre dans le sillage de marques notoires pour promouvoir ses propres produits ou services est pourtant régulièrement sanctionnée.
Ainsi, dans une affaire récente (Cass. crim., 17 janvier 2017, n°15-86.363), le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), propriétaire d’une marque figurative consistant en cinq anneaux entrelacés, s’est opposé à l’utilisation de ce signe par un tiers. Une société gérant plusieurs pubs à Paris avait apposé la marque sur son site Internet et sur 200 000 sous-bocks de bière pour –prétendument– informer sa clientèle de la retransmission dans ses établissements des Jeux olympiques de Londres 2012.
Après un jugement favorable à la société en première instance, la cour d’appel de Paris et la Cour de cassation ont été, à juste titre, beaucoup moins indulgentes. Selon la Haute juridiction, la marque en question étant « connue dans le monde entier [et jouissant] d’un prestige et d’une renommée exceptionnelle [sic] », son utilisation par les prévenus à des fins commerciales pour attirer la clientèle, sans autorisation du CNOSF et sans contrepartie financière, constitue une contrefaçon au sens de l’article L.713-5 du Code de la propriété intellectuelle.
Par cet arrêt, la Cour de cassation confirme une jurisprudence constante de la Cour de justice de l’Union européenne selon laquelle, pour jouir de la protection élargie dont bénéficient les marques notoires, il n’est pas nécessaire d’établir un risque de confusion dans l’esprit du consommateur (CJUE, 23 octobre 2003, C-408/01, Adidas c/ Fitnessworld Training ; principe d’ailleurs confirmé par un autre arrêt récent de la Cour de cassation : Cass. com., 12 avril 2016, n°14-29.414). Au contraire, il suffit que le public concerné établisse un lien entre la marque et le signe utilisé par le tiers.
Ce lien, incontestable et incontesté en l’espèce, doit être prouvé par le propriétaire de la marque notoire. Une fois établi, le propriétaire peut s’opposer à toute utilisation de sa marque notoire de nature à lui porter préjudice ou qui constituerait une exploitation injustifiée de son caractère distinctif ou de sa renommée.
Il n’est par conséquent pas surprenant que la Cour de cassation ait rejeté le moyen selon lequel la marque n’aurait été utilisée qu’à des fins d’information, le bénéfice commercial susceptible d’en être tiré étant évident, alors que l’usage du signe n’apportait aucun « plus » pour l’information de ceux qui en prenaient connaissance. La Cour de cassation rejette aussi le moyen fondé sur l’exception de parodie, sans prendre la peine d’énoncer l’absence – évidente – d’intention parodique des prévenus.
Cet arrêt rappelle les risques qui résultent de l’utilisation d’une marque notoire sans l’accord de son titulaire, aussi tentant que cela puisse paraître.
Auteur
Anne-Laure Villedieu, avocat associée en droit de la propriété industrielle, droit de l’informatique, des communications électroniques et protection des données personnelles.