Délit de facilitation de falsification de denrées alimentaires
L’article L.413-1, 3° du Code de la consommation (ancien art. L.213-3 I , 4°) interdit, sous peine d’une amende pénale, le fait d’exposer, de mettre en vente ou de vendre, en connaissant leur destination, des produits, objets ou appareils propres à falsifier des produits servant à l’alimentation humaine ou animale, des boissons ou des produits agricoles ou naturels.
La cour d’appel de Poitiers avait condamné, sur le fondement de ces dispositions, une société fabricant d’additifs et son dirigeant pour avoir vendu un additif, non autorisé au sein de l’Union européenne (UE) pour l’usage agro-alimentaire, à une société qui l’avait incorporé à un arôme servant à l’élaboration de sirops à l’anis. Elle avait estimé que ce dirigeant avait délibérément mis en vente l’additif litigieux qu’il savait destiné à l’alimentation humaine et qu’il ne pouvait pas s’exonérer de sa responsabilité pénale (tout comme sa société) en invoquant l’absence d’interdiction de la vente de l’additif en elle-même et l’ignorance de la destination finale de ce produit acquis par des sociétés domiciliées en France ou dans l’UE. En effet :
- la société cliente était spécialisée dans la fabrication d’arômes alimentaires et s’approvisionnait régulièrement auprès de la société fabricante, de sorte que l’usage du produit litigieux comme additif alimentaire ne pouvait échapper au dirigeant de cette dernière, professionnel averti de la commercialisation de tels additifs, qui n’ignorait rien de la législation qui leur était applicable en France ;
- et la société fabricante avait remis à sa cliente une fiche technique présentant l’additif comme pouvant être utilisé dans des émulsions aromatiques généralement employées dans la fabrication de certaines boissons, en synergie avec un autre additif alimentaire autorisé, mettant ainsi en exergue un usage agro-alimentaire du produit.
La Cour de cassation a estimé, après avoir rappelé que les dispositions précitées incriminent le fait de faciliter la falsification d’une denrée alimentaire par adjonction d’un additif non autorisé en vendant en connaissance de cause le produit, que la Cour d’appel avait caractérisé les éléments tant matériels qu’intentionnels de ce délit, peu important à cet égard l’auteur de la falsification et la destination finale de la denrée falsifiée.
Il résulte de cette décision que si la destination alimentaire de la denrée falsifiée doit être connue pour que le délit de facilitation de falsification soit qualifié, ce qui était le cas en l’espèce, la société cliente étant spécialisée dans l’agro-alimentaire, la connaissance des pays dans lesquels cette denrée sera commercialisée n’est pas pour autant requise.
Cass. crim., 31 mai 2016, n°15-83.046
Auteurs
Nathalie Pétrignet, avocat associée en droit douanier, droit de la concurrence, droit européen, droit de la consommation et de la distribution, CMS Bureau Francis Lefebvre Paris
Elisabeth Flaicher-Maneval, avocat Counsel au sein du département de doctrine juridique, CMS Bureau Francis Lefebvre Paris