Un nouveau report d’imposition pour les entrepreneurs ?
Imaginé par Emmanuel Macron alors qu’il était encore ministre de l’Economie, le compte épargne investisseur figure finalement, sous la nouvelle dénomination « compte PME innovation » (CPI), dans le Projet de Loi de Finances Rectificative (PLFR) 2016. Ce dispositif, présenté par le gouvernement comme un soutien supplémentaire à l’activité économique, vise à inciter les entrepreneurs-cédants à réinvestir le produit de la vente de leur entreprise dans des jeunes PME ou des entreprises innovantes.
Concrètement, les titres dont la cession est envisagée devront être transférés sur le CPI, de telle sorte que la plus-value de cession puisse bénéficier d’un report d’imposition et de l’imputation des éventuelles moins-values ultérieures réalisées au sein du CPI.
L’imposition n’interviendra qu’à la clôture du CPI, à hauteur du résultat net des transactions effectuées au sein du CPI depuis son ouverture. Notons que la simplicité risque de ne pas être tout à fait au rendez-vous : le projet prévoit que le report d’imposition ne vaudra que pour l’impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux restant dus au titre de l’année de réalisation des plus-values.
Les dividendes distribués par les sociétés dont les titres sont inscrits dans le CPI sortiront automatiquement du compte et seront imposés selon le droit commun.
Les entrepreneurs-cédants éligibles au CPI sont les dirigeants ou salariés ayant acquis au moins 10% du capital de leur entreprise au cours des 10 premières années d’existence de celle-ci. Pour les actionnaires n’exerçant pas de fonction au sein de la société, le seuil de détention est fixé à 25%.
Pour bénéficier du report d’imposition, l’entrepreneur-cédant devra réinvestir le prix de cession (net des prélèvements sociaux?) au capital de PME de moins de 7 ans (ou de moins de 10 ans pour les entreprises innovantes) dans les 24 mois de la cession. Il devra en outre accompagner la cible en y exerçant une fonction de direction ou en siégeant à son conseil d’administration ou à son conseil de surveillance ou encore en signant avec la société une convention d’accompagnement-conseil non rémunérée. Le CPI ne devrait pas comporter de plafond.
Aucune mesure n’accompagne le CPI en matière d’ISF alors que le projet initialement esquissé par E. Macron devait permettre au cédant de bénéficier d’une franchise d’ISF à concurrence du prix de cession, pendant les 2 ans suivant la cession.
Si le dispositif est déjà critiqué pour son insuffisance et sa complexité, il reflète la volonté de l’exécutif d’envoyer un signal positif aux investisseurs et surtout aux entrepreneurs qui favorisent l’innovation. On peut espérer que le CPI, qui viendra ainsi s’ajouter aux autres dispositifs censés favoriser le développement des jeunes entreprises innovantes (JEI, CII, corporate venture, etc.), sera amélioré en cours de discussion au Parlement.
Auteurs
Hubert Bresson, avocat associé en droit fiscal
Matthieu Lafont, avocat en fiscalité