Non-déductibilité fiscale pour l’acquisition d’un fonds de commerce, même non destiné à être exploité
Le prix d’acquisition d’un fonds de commerce n’a pas le caractère d’une charge déductible, ainsi que le rappelle le Conseil d’Etat dans un arrêt du 26 février 2016 (CE, 26 février 2016, n°383930, Sté Pharmacie de la Porte d’Orléans).
Une société de pharmacie avait acquis le fonds de commerce d’un bar-brasserie jouxtant ses locaux, afin de pouvoir agrandir sa propre surface de vente. Ainsi, l’acquéreur n’a jamais eu l’intention d’exploiter le fonds de commerce acquis.
Dans un premier temps, la pharmacie avait immobilisé le fonds acquis, qui avait été totalement déprécié par le biais d’une provision pour dépréciation. Dès lors que cette provision avait été remise en cause par l’administration fiscale, la société avait, dans un second temps, porté une réclamation visant à faire reconnaître que le prix d’acquisition du fonds de commerce constituait en réalité une charge déductible.
La question que le Conseil d’Etat a été amené à trancher portait ainsi sur le traitement fiscal d’un fonds de commerce acquis uniquement pour agrandir les locaux d’un autre fonds de commerce exerçant une activité différente.
A cet égard, la Haute juridiction a réaffirmé le principe d’inscription à l’actif du fonds de commerce et de ses éléments constitutifs, qui doivent suivre le régime fiscal des éléments incorporels de l’actif immobilisé de l’entreprise.
Cette règle ne connaît pas d’exception, alors même que le fonds acquis était amené à disparaître. On relèvera en effet, au cas particulier, que les éléments du fonds acquis tels que le nom commercial, la clientèle ou les installations et matériels n’étaient pas repris par l’acquéreur. De plus, s’agissant du droit au bail en principe repris, la pharmacie avait été contrainte de conclure un nouveau bail commercial comportant un loyer majoré afin d’exercer son activité dans les locaux du bar-brasserie voisin.
Ces circonstances de fait ont été jugées indifférentes par le Conseil d’Etat et les conclusions du rapporteur public Nathalie Escaut éclairent, à cet égard, la décision : la pharmacie, par l’acquisition réalisée, valorisait in fine son propre fonds de commerce puisque l’agrandissement de ses locaux lui permettait de profiter d’un accroissement de ses parts de marché.
Auteur
Jean-Hugues de la Berge, avocat en droit fiscal.